ELABORATION DES ETATS FINANCIERS SYSCOHADA AU 31/12/2018: REPONSES A DIX QUESTIONS FREQUEMMENT POSEES

Depuis le 1er janvier 2018, les règles et principes comptables ont changé dans l’espace OHADA. L’impact de ces changements varie d’une entreprise à une autre en matière de traitement comptable et de présentation des Etats financiers. La préoccupation actuelle de tous les comptables étant de préparer des Etats financiers conformes à la nouvelle réglementation, nous allons dans cet article essayer de répondre à dix (10) questions fréquemment posées sur l’élaboration des Etats financiers suivant la nouvelle réglementation.

  1. Qui a l’obligation d’établir les Etats financiers? 

L’article 2 de l’Acte Uniforme relatif au droit comptable et à l’information financière précise les entités suivantes comme étant soumises à l’obligation d’établir les Etats financiers suivants le Système comptable OHADA:

  • Entités soumises aux dispositions du Droit Commercial Général et de l’Acte Uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et GIE ;
  • Entités soumises aux dispositions de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés coopératives;
  • Entités publiques, para publiques ou d’économie mixte ;
  • Entités produisant des biens et services marchands ou non marchands, dans la mesure où elles exercent dans un but lucratif ou non des activités économiques à titre principal ou accessoire qui se fondent sur des actes répétitifs.

Il existe toutefois des exceptions. Il s’agit des:

  • Entités à but non lucratif;
  • Entités soumises aux règles de la comptabilité publique;
  • Entités de certains secteurs (banques, assurances,..) soumis à des réglementations spécifiques.

2. Quel Système retenir pour élaborer les Etats financiers?

Suivant l’article 11 de l’Acte Uniforme , les Etats financiers annuels sont rendus obligatoires en fonction de la taille de l’entité appréciée selon des critères de chiffre d’affaires hors taxe.

Il existe deux  systèmes de présentation des Etats financiers selon le SYSCOHADA: le système normal (SN) et le système minimal de trésorerie (SMT). Le Système allégé existant sous l’ancienne réglementation n’existe plus. Le tableau suivant résume les critères à considérer en vue du choix du Système de présentation à retenir.

Secteurs d’activitéSystème NormalSystème Minimal
de Trésorerie
Activités commerciales et NégocesChiffre d’affaires supérieur ou égal à
60 millions F CFA

Chiffres d’affaires
inférieur ou égal à
60 millions F CFA
Activités artisanales et assimilées Chiffre d’affaires
supérieur ou égal
à 40 millions F CFA
Chiffres d’affaires
inférieur
à 40 millions F CFA
Services Chiffre d’affaires
supérieur ou égal à
30 millions F CFA

Chiffres d’affaires inférieur à 30 millions F CFA
Autresx

3. Quelles sont les composantes des Etats financiers du Syscohada révisé?

Selon l’article 8 de l’AUDCIF, un jeu complet d’Etats financiers annuels comprennent:

  • Le Bilan
  • Le Compte de résultat
  • Le Tableau des flux de trésorerie
  • Les Notes annexes

Il faut noter que les Etats financiers forment un tout indissociable.

Les entités soumises au Système Minimal de Trésorerie (SMT) tiennent une comptabilité de trésorerie aboutissant à des Etats financiers composés d’un bilan, un compte de résultat et de notes annexes suivant un modèle spécifique.

4. Quels sont les caractéristiques attendus des Etats financiers?

Le syscohada définit six (06) caractéristiques clés des Etats financiers:

  • Pertinence: Une  information  financière  est  pertinente  lorsqu’elle  permet  d’influencer  les  prises  de décision et tient compte du besoin exprimé par un utilisateur légitime. Pour cela, l’information
    doit avoir une valeur de prédiction, de validation, ou les deux.
  • Fidélité: Selon le Système comptable OHADA, l’information financière donne une image fidèle quand elle dépeint la substance économique de la transaction, de l’événement ou des circonstances sous-jacentes de façon complète, et exempte d’erreurs significatives.
  • Comparabilité: La  comparabilité est la  qualité  de  l’information qui  permet  aux utilisateurs  de  relever  les similitudes et les différences entre des éléments. La comparabilité est le but ; la cohérence et la permanence dans le choix ainsi que dans l’application des méthodes comptables permettent d’atteindre cet objectif.
  • Vérifiabilité: La vérifiabilité est la qualité de l’information financière qui donne aux utilisateurs l’assurance que l’information reflète l’image fidèle des phénomènes économiques décrits. La vérifiabilité suppose que divers observateurs bien informés et indépendants pourraient aboutir à un consensus sur la fidélité de l’information.  Il  peut  s’avérer impossible de vérifier certaines informations prospectives; dans ce cas, il sera nécessaire d’indiquer les hypothèses sous-jacentes ainsi que les méthodes d’évaluation utilisées.
  • Rapidité: La rapidité répond au besoin de rendre l’information financière accessible aux décideurs avant qu’elle ne perde sa capacité d’influencer leurs décisions. Rendre plus rapidement accessible une information pertinente peut accroître son influence. En règle générale, plus l’information date, moins elle est utile.
  • Compréhensibilité: La compréhensibilité est la qualité de l’information financière qui permet d’en comprendre la signification. Elle se trouve accrue lorsque l’information est classée, définie et présentée de façon  claire  et  concise. La  comparabilité,  la  simplicité  et  la  rigueur  logique  peuvent également améliorer la compréhensibilité.

5. Comment assurer la comparabilité des Etats financiers au 31/12/2018 et ceux clôturés au 31/12/2017 dans le contexte du changement de réglementation?

En vue d’assurer la comparabilité des comptes entre le 31/12/2018 et le 31/12/2017, le SYSCOHADA révisé a prévu l’établissement de comptes pro formas.

L’information pro forma vise à donner à un investisseur ou un actionnaire l’impact qu’aurait eu une opération sur les états financiers historiques d’une entreprise si cette opération s’était produite à une date antérieure à sa survenance réelle.

Il s’agit donc de refaire les Etats financiers d’un exercice antérieur, en appliquant les règles actuellement en vigueur ou en tenant compte des corrections significatives subséquemment relevées.

De façon pratique, chaque entité doit procéder à une analyse de l’impact du changement de réglementation sur chaque section de ses Etats financiers 2017 afin d’identifier d’éventuels ajustements ou reclassements dits pro-forma à effectuer. Les Etats financiers clos au 31/12/2017 corrigés des divers ajustements seront dénommés « Comptes pro forma ». Les soldes issus de ces Etats seront reportés à nouveau au 1er janvier 2018. Il en ressort une possibilité de non respect du principe d’intangibilité du bilan. Pour les besoins de compréhension de l’utilisateur des Etats financiers 2018, il est donc indispensable de joindre les comptes pro forma ainsi établis en annexe.

6. Quel est le contenu attendu des comptes pro forma?

Les comptes pro forma sont une émanation des normes IFRS. En effet en IFRS, toutes les composantes des Etats financiers font l’objet de retraitements pro forma.

Cependant, l’Avis technique relatif à l’application de l’AUDCIF – Question 18 a allégé la tâche en donnant les précisions suivantes :

  • Au 1er Janvier 2018, le SYSCOHADA n’a pas appliqué la même méthode que les normes IFRS pour éviter la reprise des écritures de 2017 conformément au SYSCODADA révisé.
  • Il a été retenu que seul le bilan fera l’objet d’un pro-forma pour les besoins des soldes d’ouverture de l’exercice d’application de la norme.
  • Ainsi, pour les états financiers de 2018 aucun chiffre ne sera inscrit dans la colonne N-1 du Compte de résultat et du Tableau des flux de trésorerie.

L’une des questions qu’on nous a posé sur le sujet est celle ci: « Si une entité se sent en mesure de produire les comparatifs pour l’ensemble des Etats (Bilan, compte de résultat et Tableau des flux ), ses comptes pro forma seraient-ils rejetés? »
A notre avis, l’avis technique n’a fait que préciser le minimum qui est demandé à chaque entité. Si une entité fait plus, il faudra toutefois dans une optique de fiabilité des informations financières qu’elle s’assure de ne pas publier des données incorrectes.

L’autre question est celle-ci: « Dans la mesure où il n’ y aura pas de comparatif du compte de résultat, comment renseigner les notes faisant appel aux comptes de gestion? »

A notre avis, ces notes ne seront renseignées que pour l’exercice 2018.

7. Quel est l’impact attendu du changement de réglementation sur le système d’information comptable des entités?

Le changement de réglementation a induit une revue de la nomenclature des comptes du PCGO. Chaque entité devra donc procéder à une revue de son plan des comptes en vue de le mettre en adéquation avec le nouveau plan comptable. Cet exercice est indispensable pour assurer la correcte présentation des Etats financiers.

Par ailleurs, la forme et la présentation des Etats financiers ayant changé, il est évident que les liasses Syscohada publiées au 31/12/2017 ne sont plus d’actualité. Les entreprises devront donc concevoir ou acquérir des applications permettant d’élaborer leurs Etats financiers au 31/12/2018 selon les nouvelles règles.

A cet effet, nous avons développé une application hautement automatisée, assurant un gain de temps perceptible dès utilisation que vous pouvez vous procurer via notre BOUTIQUE .

Les manuels de procédures comptables devront également faire l’objet de mise à jour pour être en phase avec la nouvelle réglementation.

8. Les entités exerçant dans l’espace OHADA sont-elles soumises aux normes IFRS?

Selon l’article 8 de l’AUDCIF, les entités dont les titres sont inscrits à une bourse de valeurs et celles qui sollicitent un financement dans le cadre d’un appel public à l’épargne, doivent établir et présenter les états financiers annuels selon les normes internationales d’informations financières, appelées normes IFRS, en sus des états financiers visés aux alinéas précédents.
Les états financiers annuels établis selon les normes IFRS sont destinés exclusivement aux marchés financiers. Ils ne peuvent servir de support de base pour la détermination du bénéfice distribuable visé par l ‘Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique.

9. Qu’entend-on dans le nouveau référentiel par Etats financiers intermédiaires?

Les Etats financiers intermédiaires sont ceux établis sur une période inférieure à 12 mois. Ainsi on peut élaborer des Etats mensuels, trimestriels, semestriels, etc. Dans le secteur bancaire par exemple, depuis le 1er janvier 2018, les entités sont tenus de publier des Etats financiers semestriels.

Notons que le Syscohada révisé présente les règles de présentation et d’évaluation à respecter au cas ou une entité décide de présenter des comptes intermédiaires soit par obligation légale ou réglementaire, soit volontairement, mais ne précise pas les entités devant publier les comptes intermédiaires ni la périodicité.

Ces Etats financiers peuvent ou non faire l’objet d’une revue limitée par le CAC, en fonction du secteur et de l’exploitation que l’entité entend en faire.

10. Les diligences du commissaire aux comptes changent-elles dans le contexte de la nouvelle réglementation?

Le changement de réglementation comptable ne change pas les obligations initiales du commissaire aux comptes en termes d’approche (Normes ISA) et de rapports (AUSCGIE de l’OHADA). Cependant, l’opinion du CAC se basant sur un référentiel comptable, il ne peut rester indifférent aux changements intervenus dans ce référentiel. C’est ainsi que le CAC doit pour son intervention sur les comptes 2018, valider, en premier lieu, le bilan d’ouverture qui doit être issu du bilan pro forma que chaque entité est tenue d’établir. Des limitations significatives à la revue du bilan d’ouverture pourraient conduire à des réserves dans le contexte du changement de réglementation comptable.

Ensuite, dans ses contrôles des opérations de 2018, le CAC va devoir se baser sur les nouvelles règles comptables pour conclure sur ses différentes assertions. C’est ainsi qu’un point peut avoir été validé l’année passée mais remis en cause cette année, du fait des changements intervenus dans la réglementation.

Exemple: Un contrat de location qui était traité jusqu’au 31/12/2017 comme une location simple peut être traité comme un actif du preneur en 2018, dès lors qu’il a été renouvelé en 2018 et qu’il rempli les conditions prévues pour considérer un contrat comme étant un contrat de location et non de prestation de services. Voir mon article sur les contrats de location pour mieux cerner ce sujet. https://carrefourcompta.com/2018/11/18/les-contrats-de-location-nouvelle-definition-du-syscohada/

Il y a plusieurs changements de ce genre pouvant impacter les conclusions d’audit. Vigilance requise donc pour les auditeurs / commissaires aux comptes.

Voila donc les 10 questions auxquelles nous avons essayé de répondre.

Si vous avez aimé cet article, n’hésitez pas à le partager et à laisser vos commentaires ou questions. A bientôt pour de nouveaux sujets.

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Les immeubles de placement: Quel traitement comptable dans l’espace OHADA ?

La forte urbanisation de l’Afrique ces dernières années ne va pas sans l’accroissement des infrastructures routières et des immeubles à usage commercial et professionnel. Dans ce contexte, il est de plus en plus fréquent de voir des firmes internationales ou locales ériger de grands édifices pour abriter leurs représentations ou leurs sièges sur le continent. Généralement, une partie des locaux de ces immeubles grandeurs nature est destinée à la location. Par ailleurs, se développe aussi la construction ou l’acquisition d’immeubles destinés carrément à la location ou à d’autres formes de valorisation. Dans les deux cas, on parlera de la détention par l’entité d’immeubles de placement.

Dans cet article, nous allons aborder l’essentiel à retenir de la notion d’immeubles de placement instaurée par la récente révision du Syscohada.

Définition et caractéristiques

Le SYSCOHADA révisé définit un immeuble de placement comme étant « un bien immobilier, c’est-à-dire un terrain, un bâtiment, ou une partie de bâtiment ou les deux (un terrain et un bâtiment) détenu par le propriétaire ou par le preneur, dans le cadre d’un contrat de crédit-bail ou location-vente pour en retirer des loyers ou pour valoriser le capital ou pour les deux.

Notons que cette définition est inspirée des normes comptables internationales, notamment l’IAS 40 qui donne, par ailleurs, certaines précisions quant à la qualification ou non d’un bien immobilier d’immeuble de placement.

Selon cette norme, on peut qualifier par exemple, d’immeubles de placement :

  • un terrain détenu pour valoriser le capital à long terme plutôt que pour une vente à court terme dans le cadre de l’activité ordinaire ;
  • un terrain détenu pour une utilisation future actuellement indéterminée (si une entité n’a pas déterminé qu’elle utilisera le terrain soit comme un bien immobilier occupé par son propriétaire, soit pour le vendre à court terme dans le cadre de son activité ordinaire, le terrain est considéré comme étant détenu pour valoriser le capital) ;
  • un bâtiment appartenant à l’entité (ou détenu par l’entité dans le cadre d’un contrat de location-financement) et donné en location dans le cadre d’un ou plusieurs contrats de location simple ;
  • un bâtiment vacant mais détenu en vue d’être loué dans le cadre d’un ou plusieurs contrats de location simple.

Sont, par exemple, des éléments qui ne sont pas des immeubles de placement :

  • un bien immobilier détenu en vue de sa vente dans le cadre de l’activité ordinaire ou du processus de construction ou d’aménagement pour ladite vente, par exemple, un bien immobilier acquis exclusivement pour être vendu ultérieurement dans un avenir proche ou être aménagé et revendu ;
  • un bien immobilier en cours de construction ou d’aménagement pour le compte de tiers ;
  • un bien immobilier occupé par son propriétaire, y compris (entre autres choses) un bien immobilier détenu en vue de son utilisation future comme bien immobilier occupé par son propriétaire, un bien immobilier détenu en vue de son aménagement futur et de son utilisation ultérieure comme bien immobilier occupé par son propriétaire, un bien immobilier occupé par des membres du personnel (que ceux-ci paient ou non un loyer aux conditions de marché) et un bien immobilier occupé par son propriétaire en attendant d’être vendu ;
  • un bien immobilier en cours de construction ou d’aménagement en vue d’une utilisation ultérieure en tant qu’immeuble de placement.
  • un bien immobilier donné en location à une autre entité dans le cadre d’un contrat de location-financement.

Cas spécifiques

Dans un premier cas, nous allons considérer que l’immeuble entier est mis en location, le propriétaire étant ailleurs. L’ensemble de l’immeuble sera donc considéré comme un placement.

Dans un second cas, nous allons considérer que l’immeuble fait l’objet d’un usage mixte (Exploitation et placement). Dans ce cas particulier, il faudra avant tout s’assurer que les différentes parties de l’immeuble peuvent être vendues séparément. Une fois cette condition remplie, la partie qu’occupe l’entité sera traitée comme un immeuble d’exploitation pendant que le reste sera assimilé à un placement.

Toutefois, si la partie qu’occupe l’entité est non significative, le bien immobilier sera considéré dans son ensemble comme un immeuble de placement.

Par exemple, une entité vient d’acheter à crédit un immeuble de 4 étages pour 200 000 000 F CFA. Elle occupe le premier étage pour ses besoins administratifs et loue les autres étages à d’autres entités.

Il est indiqué que les différentes parties du bien peuvent être vendues séparément. On peut donc utiliser l’approche par composants. On comptabilisera ainsi un quart de 200 MFCFA soit 50 MFCFA en immobilisations corporelles, et trois quart de 200 MFCFA soit 150 MFCFA en tant qu’immeuble de placement.

Si par contre le propriétaire occupe juste une salle du 1er étage et que tout le reste y compris les autres salles du 1er étage est mis en location, on pourra considérer que la partie occupée par le propriétaire est non significative. Dans ce cas, l’ensemble des 4 étages de l’immeuble sera traité comme un immeuble de placement.

Une autre particularité des immeubles de placement est l’identification des biens immobiliers loués avec fourniture de services accessoires. De quoi s’agit-il concrètement ?

Un hôtel par exemple offre des services accessoires significatifs à la location de ses chambres, car dès lors qu’on loue une chambre, on dispose des meubles, du service de chambre, de l’assistance du personnel durant tout le séjour.

La location de chambre dans ce contexte ne pouvant être détachée des services accessoires, ces derniers pourront être considérés comme étant significatifs. Ainsi donc, l’immeuble d’un hôtel classique ne sera pas traité comme un placement mais un immobilier d’exploitation.

Par contre, le bien immobilier est à classer en immeubles de placement, si ces services sont non significatifs au regard du contrat pris dans son ensemble.

Évaluation des immeubles de placement

La norme IAS 40 de laquelle est inspirée cette nouvelle règle prévoit deux modes d’évaluation des immeubles de placement. Il s’agit de l’évaluation au coût et à la juste valeur. En IFRS, à l’initiation de l’opération, l’évaluation se fait obligatoirement au coût alors que lors des comptabilisations ultérieures, l’évaluation peut se faire selon l’une ou l’autre des modes d’évaluation précités.

La juste valeur n’étant pas retenue par le Syscohada dans ses modes d’évaluation, le seul mode qui reste est l’évaluation au coût aussi bien à l’initiation que lors des comptabilisations ultérieures. Autrement dit, l’évaluation d’un immeuble de placement dans l’espace OHADA ne présente aucune particularité par rapport aux immeubles d’exploitation, en termes d’évaluation.

Traitement comptable et présentation au bilan

  • Dès lors qu’un immeuble de placement répond aux critères généraux de comptabilisation à l’actif, notamment si elles génèrent des avantages économiques futurs supplémentaires et que son coût peut être évalué de façon fiable, il doit être comptabilisé en immobilisation.
  • Les dépenses ultérieures relatives à un immeuble de placement, doivent être comptabilisées en tant qu’actif du moment où elles sont encourues et répondent aux mêmes critères.
  • A la clôture de l’exercice les immeubles de placement font l’objet d’un amortissement sur leur durée d’utilité.

Aujourd’hui, les Etats financiers annuels du Syscohada mettent en exergue sur, une ligne distincte, la quote-part des immeubles (inscrits à l’actif soit à titre de propriété, soit à titre de location financement/vente) détenus en placement.

Ainsi donc, l’impact essentiel de cette norme telle que retenue par le Syscohada révisé, est la présentation de la valeur des immeubles de placement de façon distincte à l’actif et l’exigence de notes spécifiques prévues pour leur analyse.

A bientôt pour de nouveaux partages!

La capitalisation des coûts d’emprunt selon le Syscohada révisé

Il arrive, dans la phase de croissance ou même d’implantation d’une entreprise, que ses promoteurs soient obligés de recourir à un financement externe, notamment auprès de bailleurs internationaux ou de banques locales. Ces financements peuvent être directement affectés à un investissement ou plutôt être d’ordre général. Selon le cas, la société devra s’assurer d’un traitement adéquat des coûts liés à ce financement au niveau comptable.

La question du traitement comptable des coûts d’emprunt a été abordée par la norme IAS 23 dont la version révisée est entrée en vigueur depuis janvier 2009. La révision récente du Syscohada a permis à notre Espace de rattraper le train.

Il faut toutefois préciser que la norme IAS 23 s’appliquait déjà sous l’ancien référentiel mais n’était qu’une autorisation. Aujourd’hui, elle n’est plus une option mais bien une obligation, sauf cas d’exclusions prévus.

Dans cet article, nous allons essayer de comprendre de façon un peu plus pratique cette notion.

  1. La notion de coût d’emprunt

Selon l’ IAS 23, les coûts d’emprunt  sont les intérêts et autres coûts qu’une entité encourt dans le cadre d’un emprunt de fonds.

Le Syscohada révisé, reprenant la même définition, précise qu’ils peuvent inclure, notamment :

  • les charges d’intérêts sur les découverts bancaires, les crédits à court, moyen ou long terme ;
  • les charges financières en rapport avec les contrats de location-acquisition ;
  • les différences de change résultant des emprunts en devises, dans la mesure où elles sont assimilées à un ajustement des coûts d’intérêts

Dans la pratique, on peut également noter des charges telles que :

  • l’amortissement des primes d’émission ou de remboursement relatives aux emprunts. Exemple : Commissions d’engagement ou d’arrangement.
  • l’amortissement des coûts accessoires (honoraires et commissions dus au prêteur) encourus pour la mise en place des emprunts.

Tous ces coûts sont, en temps normal, considérés comme des charges. Cependant, lorsqu’ ils se rapportent à un actif qualifié, ils devront faire l’objet de capitalisation.

  • Qu’est-ce donc qu’un actif qualifié ?

Un actif qualifié à la capitalisation des coûts d’emprunt est un actif qui exige une longue période de préparation avant de pouvoir être utilisé ou vendu. Le Syscohada n’est pas ferme sur la définition de la notion de « longue période » mais donne à titre d’exemple une durée supérieure ou égale à 12 mois. L’ IAS 23 est plus précis en considérant comme étant longue, une durée supérieure à 12 mois. Il se pose ainsi une petite contradiction entre la norme originale et sa transposition dans le Syscohada sur ce point spécifique.

Concrètement, si l’on emprunte de l’argent pour financer la construction d’un bâtiment dont les travaux sont prévus pour au plus douze mois, on n’aura pas l’obligation de capitaliser les coûts d’emprunt. Cependant,si les travaux sont prévus sur plus de 12 mois, sous réserve du respect des autres critères, et du jugement du management, les coûts liés à l’emprunt servant à financer ce bâtiment devront être intégrés dans la valeur du bâtiment.

Exemple d’actifs susceptibles d’être qualifiés :

  • stocks ;
  • installations de fabrication ;
  • installations de production d’énergie ;
  • immeubles de placement ;
  • immobilisations incorporelles (pendant la phase de développement) ;
  • contrats de construction comptabilisés  selon les dispositions relatives aux contrats pluri-exercices (Travaux BTP).
  • Les frais d’étude et d’ingénierie pour les services informatiques, les infrastructures et les ouvrages d’art.
  • Les stocks fabriqués à la commande sur un cycle de plusieurs mois.
  • Les stocks portéssur une longue période (tels que champagnes, cognacs et autres alcools).
  • Etc..

Notion de jugement

Le Syscohada autorise une part de jugement dans l’application de cette règle.

Ainsi par exemple, un actif qui nécessite une période de préparation supérieure ou égale à une année devrait en principe répondre à la définition d’un actif qualifié. Mais cette période peut être inférieure à 12 mois si l’entité juge celle-ci significative. Dans ce cas, elle est tenue de justifier son choix par une mention dans les notes annexes.

En conséquence, seront considérés par exemple comme des actifs qualifiés :

  • des avions et bateaux destinés à la vente dont la durée de construction est de 2 ans ;
  • un  immeuble de bureaux en construction,  destiné  à  être loué  et  dont la  durée de construction est de 18 mois ;
  • l’extension d’un entrepôt dont la durée prévisionnelle de construction est de 1 an.

Exclusions

Ne sont pas des actifs qualifiés :

  • les actifs financiers, notamment les prêts et autres créances ;
  • les autres actifs tels que les stocks fabriqués de façon régulière ou produits de façon répétitive en grandes quantités, sur une courte période ;
  • les actifs prêts à être utilisés ou vendus, au moment de leur acquisition.
  • Quels coûts d’emprunt faut –il incorporer dans le coût d’un actif

Il faut distinguer deux scenarios.

Scenario 1 : L’emprunt a été fait pour financer un investissement spécifique

Dans la mesure où une entité emprunte des fonds spécifiquement en vue de l’obtention d’un actif qualifié, l’entité doit déterminer le montant des coûts d’emprunt incorporables au coût de l’actif comme étant égal aux coûts d’emprunt réels encourus sur cet emprunt au cours de la période, diminués de tout produit obtenu du placement temporaire de ces fonds empruntés.

Scenario 2 : L’emprunt n’a pas été affecté à un projet/investissement spécifique

Dans la mesure où une entité emprunte des fonds de façon générale et les utilise en vue de l’obtention d’un actif qualifié, elle doit déterminer le montant des coûts d’emprunt incorporables au coût de l’actif en appliquant un taux de capitalisation aux dépenses relatives à l’actif. Ce taux de capitalisation doit être la moyenne pondérée des coûts d’emprunt applicables aux emprunts de l’entité en cours au titre de la période, autres que les emprunts contractés spécifiquement dans le but d’obtenir l’actif concerné.

C’est le cas par exemple des groupes qui adoptent le Cash-pooling comme stratégie de gestion de trésorerie.

Check point

Le montant des coûts d’emprunt qu’une entité incorpore au coût de l’actif au cours d’une période donnée ne doit pas excéder le montant total des coûts d’emprunt qu’elle a encourus au cours de cette même période.

  • 4.    Quelle Période retenir pour l’incorporation ?

Début de l’incorporation dans le coût d’un actif

La date de commencement pour l’incorporation à l’actif est la date à laquelle l’entité remplit pour la première fois toutes les conditions suivantes:

  • elle encourt des dépenses pour l’actif ;
  • elle encourt des coûts d’emprunt ; et
  • elle entreprend des activités indispensables à la préparation de l’actif préalablement à son utilisation ou à sa vente.

Suspension de l’incorporation dans le coût d’un actif

Les entités doivent suspendre l’incorporation des coûts d’emprunt pendant les périodes longues au cours desquelles elles interrompent le développement actif d’un actif qualifié.

Arrêt de l’incorporation dans le coût d’un actif

Les entités doivent mettre fin à l’incorporation des coûts d’emprunt lorsque les activités indispensables à la préparation de l’actif préalablement à son utilisation ou sa vente prévue sont pratiquement toutes terminées.

Lorsqu’une entité termine la construction d’un actif qualifié par parties et que chacune des parties constitutives, dont la construction se poursuit, est utilisable indépendamment des autres, elle doit cesser d’incorporer les coûts d’emprunt dans le coût de cette partie lorsqu’elle termine pratiquement toutes les activités indispensables à la préparation de cette partie préalablement à son utilisation ou à sa vente prévue.

Exemple : Un terminal à conteneurs dont les 3/4 du quai est terminé et exploitable. Dès lors qu’il y a mise en service partiel, on n’incorporera désormais les coûts que dans la limite du ¼ restant si ce ¼ est considéré comme étant significatif. Au cas contraire, on considérera que les ¾ étant finalisés et représentant la quasi-totalité de la capacité du terminal, on arrête l’incorporation des coûts. Il faudra surtout, dans ce cas, s’assurer du caractère non significatif des coûts liés aux ¼ de travaux en cours.

  • Quel mode de comptabilisation

Le syscohada révisé n’aborde, de façon détaillée, la comptabilisation des coûts d’emprunt.

En se référant à l’ IAS 23, on retient que les entités doivent inscrire à l’actif les coûts d’emprunt qui sont directement attribuables à l’acquisition, la construction ou la production d’un actif qualifié, comme un élément du coût de cet actif. Elles doivent comptabiliser les autres coûts d’emprunt en charges dans la période au cours de laquelle elles les encourent. La norme internationale ne donne pas plus de précision sur le schéma de comptabilisation.De notre analyse, deux schémas peuvent être retenus.

Schéma 1 : On comptabilise l’ensemble des coûts d’emprunt en charges et en fin d’exercice on transfert la quote-part incorporable à l’actif en utilisant notamment le compte de « Transfert de charges d’exploitation »

Schéma 2 : On comptabilise directement la quote –part des coûts incorporable à l’actif en addition à la valeur de l’actif principal. Ainsi, seules les charges non incorporables seront au compte de résultat. De notre analyse, il ressort que ce schéma répond plus à la logique de la norme.

Quel que soit le schéma adopté, l’impact sur le résultat sera le même.

  • 6.    Quelles Informations fournir en annexe ?

Les entités doivent fournir les informations suivantes :

  • le montant des coûts d’emprunt incorporés dans le coût d’actifs au cours de la période ;  et
  • le taux de capitalisation utilisé pour déterminer le montant des coûts d’emprunt pouvant être incorporés dans le coût d’actifs.

La juste valeur : Nouveau mode d’évaluation retenue par le Plan comptable bancaire (PCB) révisé de l’UMOA – Comment l’appréhender?

L’article 35 du PCB révisé défini l’évaluation comme étant « le processus consistant à déterminer les valeurs monétaires auxquelles les éléments des états financiers seront comptabilisés et inscrits aux bilan, hors –bilan et compte de résultat ». Elle implique un choix parmi les conventions que sont le coût historique et la juste valeur.

Le PCB révisé retient deux modes d’évaluation des actifs et passifs des Etablissements assujettis. Il s’agit du coût historique et de la juste valeur, ce dernier étant une nouveauté pour notre zone monétaire. 
Cet article va nous permettre d’aborder la juste valeur,telle qu’intégrée par le PCB révisé.

De quoi parle-t-on ?

La juste valeur n’est pas une notion si nouvelle que ça. En effet, il s’agit d’un des modes d’évaluation clés retenu depuis des années par les normes comptables internationales. Il a fait l’objet par la suite d’une norme spécifique, la norme IFRS 13 dont la définition a été reconduite par les Experts de la zone UMOA.

L’article 37 du PCB révisé défini ainsi la juste valeur comme : « une mesure fondée sur le marché et non une mesure spécifique à une entité. Elle correspond au prix qui serait reçu pour la vente d’un actif ou payé pour le transfert d’un passif lors d’une transaction normale entre des intervenants du marché à la date d’évaluation, que ce prix soit directement observable ou estimé selon une autre technique d’évaluation. »

De cette définition, il ressort trois notions clés qui feront l’objet de notre développement.

Le marché

La notion de marché fait référence au marché principal d’un actif ou passif et au marché secondaire qualifié de « marché le plus avantageux ». Selon IFRS 13,le marché le plus avantageux est celui qui maximise le montant qui serait reçu pour la vente de l’actif ou qui minimise le montant qui serait payé pour le transfert du passif, après prise en compte des coûts de transaction et des frais de transport. On ne s’y réfère que si le marché principal ne fournit pas des données directement observables.

Les intervenants du marché

Les intervenants du marché présentent les caractéristiques suivantes :

  1. Ils sont indépendants les uns des autres (ils ne sont pas des parties liées).
  2. Ils sont bien informés et utilisent toute l’information disponible.
  3. Ils sont capables de conclure une transaction.
  4. Ils sont disposés à conclure la transaction (ils n’y sont pas forcés).

On se rend donc compte que pour une bonne évaluation, il faut considérer l’intérêt de l’intervenant et non celui de l’entité qui détient les titres. Ceci assure une certaine objectivité dans l’évaluation.

Par exemples l’entité devrait tenir compte de caractéristiques pertinentes d’un actif, telles que :

  • L’état de l’actif et l’endroit où il se trouve;
  • Les restrictions, le cas échéant, sur la vente ou l’utilisation de l’actif.

Les techniques d’évaluation

L’article 37 du PCB révisé retient trois approches d’évaluation à la juste valeur. Concrètement,  à la date d’inventaire ou d’arrêté, il s’agira de passer par un processus graduel permettant de décider de l’approche la plus pertinente permettant une évaluation optimale et fiable de l’actif pou du passif. Nous allons donc détailler ces trois approches, tout en nous inspirant de nos expériences pratiques en IFRS pour les illustrer.

L’approche par le marché : On considère que c’est l’approche par excellence.

Cette approche se fonde sur les prix et autres informations pertinentes générées par des transactions de marché identiques ou comparables.

Par exemple, si vous détenez des instruments de capitaux(actions et instruments apparentés par exemple), leur évaluation à la clôture doit d’abord se baser sur leur cours en bourse à la date d’évaluation. Les actions des entreprises cotées de l’UEMOA seront évaluées par exemple à leur cours à la BRVM (Bourse Régionale des Valeurs Mobilières), non ajustés à la date d’évaluation.

La différence entre la valeur en bourse et la valeur du titre enregistré à l’actif à son coût d’acquisition constitue ce qu’on appelle les variations de juste valeur qui, en IFRS, n’impacte pas le résultat net mais plutôt les OCI (Other comprehensive income/Autres éléments du résultat global) se traduisant concrètement par des réserves positionnées en capitaux propres dits recyclables.

Dans le PCB, les variations de juste valeur sont comptabilisées sous forme de dépréciations au compte de résultat, notamment pour les éléments patrimoniaux non amortissables.

L’approche par le résultat : Elle désigne les techniques d’évaluation utilisées pour convertir des montants futurs en un montant unique actualisé. La juste valeur est ainsi déterminée à partir des valeurs correspondant aux attentes du marché quant à ces montants futurs.

Concrètement, ici, on considère que l’approche par le marché n’est pas applicable, car les actions ne sont pas cotées et on n’a pas pu non plus identifier des actions comparables sur le marché.

La deuxième option est de procéder à une évaluation des actions par l’une des méthodes d’évaluation financière, notamment le DCF (Discounted Cash-flow). Pour les institutions financière, il est souvent déterminé en actualisant les dividendes attendus de ces actions sur les années à venir.

L’approche par les coûts : Il s’agit, en l’absence de données observables sur le marché, de se contenter de la valeur actuelle de l’actif à la clôture, i.e. le montant qui serait requis à la date d’évaluation pour remplacer sa capacité de service.

Si nous revenons à notre exemple, dans l’incapacité d’estimer avec une fiabilité suffisante les flux de trésorerie devant servir à la détermination de la juste valeur des actions, on va devoir se contenter de leur valeur actuelle qui sera déterminée généralement en se basant sur les Etats financiers de l’entité dont on détient les titres. La situation nette corrigée ou encore actif net corrigé des actions sera généralement le mode d’évaluation qui permettra de déterminer la valeur actuelle des actions pour lesquelles l’approche par le marché et l’approche par le résultat s’avère impossible.

Globalement, les données utilisées pour l’évaluation (qualifiées de données d’entrée) sont classifiées par IFRS 13 en 3 niveaux :

  • Données d’entrée de niveau 1 – cours (non ajustés)auxquels l’entité peut avoir accès à la date d’évaluation, sur des marchés actifs, pour des actifs ou des passifs identiques. 
    Exemple : Actions ou obligations cotées sur un marché actif.
  • Données d’entrée de niveau 2 – données concernant l’actif ou le passif, autres que les cours du marché inclus dans les données d’entrée de niveau 1, qui sont observables directement ou indirectement.  Exemple : Une obligation cotée qui a connu peu de transactions les deux ou trois dernières semaines précédant la date d’évaluation.On va devoir faire une estimation en partant des dernières cotations ajustées des tendances observables sur le marché.
  • Données d’entrée de niveau 3 – données non observables pour l’actif ou le passif. 
    Exemple : Actions non cotées.

Les données d’entrée observables sont bien entendu privilégiées par rapport aux données d’entrée non observables sur le marché.

La juste valeur est-elle un mode d’évaluation pertinente pour les banques ?

La déficience de l’information financière est considérée comme l’un des facteurs favorisant les crises financières qui par ailleurs, ont emporté certaines banques des plus solides. Par ailleurs, des régulateurs comme la BCE et la réserve fédérale ont cité l’assainissement des bilans comme l’un des facteurs pris en compte dans leurs diagnostics  monétaires. Certains outils de diagnostic des banques  centrales sont donc indirectement influencés par les normes comptables.

Au vue de la définition donnée à la juste valeur, il nous semble que son application aux banques notamment en ce qui concerne l’évaluation des actifs et passifs financiers est plutôt de nature à améliorer la qualité de l’information en tenant compte des données qualitatives les plus pertinentes et actualisées pour déterminer la valeur du patrimoine, au lieu de se contenter d’un coût historique qui ne traduit qu’une réalité antérieure. Ainsi, à notre avis,la juste valeur est la bienvenue pour aider les investisseurs à prendre les décisions en toute connaissance de cause et à aider les banques centrales dans une exploitation plus pertinente des données issues du bilan des établissements de crédit.

En même temps, la juste valeur ne peut s’appliquer à l’ensemble des opérations d’une banque, au risque d’affecter sérieusement la volatilité des fonds propres de la banque du fait de la chute du résultat provenant par exemple d’une baisse des cours sur le marché financier. La baisse des fonds propres comptable pourrait pousser les banques à retreindre les crédits accordés aux entreprises. En l’absence de financement, la capacité de croissance des entreprises pourrait être compromise affectant de facto la croissance du pays ou de l’espace économique. Aussi, dans un contexte d’application des Accords Bâle II et Bâle III, tout élément venant creuser de plus les fonds propres déjà insuffisants des banques de la zone ne serait que préjudiciable à nos économies.

En ce qui concerne l’ UMOA, l’application de la juste valeur a été assez circonscrite. On y fait appel principalement dans l’évaluation des titres détenus par les Etablissements de crédits, notamment les titres de transaction et dans l’évaluation des opérations en devises, y compris les instruments de couverture. De façon assez limité, la juste valeur est évoquée dans le cadre des contrats de location. Notamment au niveau du critère de comparaison de la valeur actualisée des paiements minimaux et la juste valeur des actifs loués.

Comme a pu le voir dans cet article, la juste valeur est une notion non négligeable qui doit être exploitée avec discernement. A notre avis,son intégration à notre référentiel a été faite avec beaucoup de discernement. Il revient aux établissements de crédit de l’appliquer convenablement et surtout d’expliquer en annexe le mode d’évaluation retenue.

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Les contrats de location: Nouvelle définition du Syscohada

L’intégration de la nouvelle norme internationale révisée IFRS 16 portant sur les contrats de location peut être considérée comme l’un des changements les plus osés du nouveau référentiel comptable de l’OHADA. Oui, osé car l’impact de l’application de cette norme sur les agrégats clés des entreprises est l’une des inquiétudes majeures aussi bien des décideurs que des régulateurs au niveau international. Il s’agit, en effet, d’un revirement que nous allons découvrir dans cet article.

Le Syscohada révisé donne, en effet, la définition suivante des contrats de location :

« Un contrat est, ou contient, un contrat de location s’il confère le droit de contrôler l’utilisation d’un actif déterminé, pour une certaine période en échange d’une contrepartie. Le contrôle est conféré lorsque le client a le droit de décider de l’utilisation de l’actif déterminé et de tirer la quasi-totalité des avantages économiques de cette utilisation. »

Cette nouvelle définition implique qu’un contrat de location existe si et seulement si :

  • l’exécution du contrat dépend de l’utilisation d’un actif déterminé;
  • le contrat confère le droit de contrôler l’utilisation de l’actif déterminé pour une certaine période en échange d’une contrepartie.

Dans cet article, je vais essayer de décortiquer cette définition en m’inspirant des détails fournis par le norme IFRS 16 dont s’est inspiré le Syscohada révisé.

Il conviendrait dans un premier temps de rappeler le traitement qui se faisait jusqu’alors. Le Syscohada avait adopté la définition de l’ancienne norme internationale (IAS 17). Selon cette ancienne norme, il existe deux types de contrat de location: les contrats de location simple et les contrats de location-financement. Les contrats de location financement entraînaient une activation du droit d’utilisation de l’actif en contrepartie d’une dette financière. Aussi, le champ des locations était-il restreint au crédit-bail avec une exception pour les contrats d’une valeur inférieure à 5% du montant brut des immobilisations et pour les cas de levée d’option hypothétique. La comptabilisation des autres contrats de location (location simple) se faisait au compte de résultat avec information en annexe.

Avec la révision, la comparaison location simple -location financement s’avère désuète car, l’IFRS 16 considère que quelle que soit la nature du contrat , le droit d’utilisation de l’actif doit être évalué et activé. Autrement dit, aujourd’hui, les locations simples devraient aussi être activées. En lieu et place, il faut distinguer aujourd’hui les contrats de location des contrats de prestation de service, ces derniers étant traités comme des charges locatives. Nous allons donc nous concentrer sur les contrats de location.

Comme relevé plus haut, dès lors qu’il est établi qu’un contrat est ou contient un contrat de location, alors l’activation du droit d’utilisation de l’actif s’impose comptablement. L’analyse concrètement se fera via les deux critères essentiels suivants.

1. L’existence d’un actif identifié.

Il existe un actif identifié si l’actif est :

  • spécifié explicitement ou implicitement dans le contrat,
  • physiquement distinct,
  • Et que le fournisseur n’a pas de droit substantiel de substitution.

Il est considéré que le droit de substitution du bailleur est substantiel si le fournisseur  :

  • a la capacité pratique de remplacer l’actif ; et
  • retire des avantages économiques de l’exercice de ce droit de substitution de l’actif

Une partie d’un actif peut constituer un actif identifié si elle est physiquement distincte – par exemple, un étage d’un immeuble. Par ailleurs, une partie qui n’est pas physiquement distincte constitue également un actif identifié si elle représente la quasi-totalité de l’actif.  Par exemple, une partie de la capacité d’un câble de fibre optique est un actif identifié si elle représente la quasi-totalité de la capacité du câble ; et n’est pas un actif identifié si elle représente seulement une partie de la capacité du câble.

2. Contrôle de l’utilisation de l’actif

Pour déterminer si un contrat donne le droit de contrôler l’utilisation d’un actif identifié, l’entreprise évalue si le preneur dispose des droits suivants :

  • droit d’obtenir la quasi-totalité des avantages économiques liés à l’utilisation de l’actif identifié au cours de la période d’utilisation ; et
  • droit de diriger l’utilisation de l’actif identifié sur cette même période.

Les avantages économiques liés à l’utilisation d’un actif comprennent sa production principale, ses sous-produits et les autres avantages économiques liés à son utilisation pouvant être réalisés dans le cadre d’une transaction commerciale avec un tiers (par exemple, la sous-location de l’actif).

L’analyse du droit de diriger l’utilisation de l’actif peut comporter une part plus importante de jugement. Pour le preneur le droit de diriger l’utilisation d’un actif identifié signifie qu’il a le droit de diriger comment et dans quel but, l’actif est utilisé.

Si le client a les droits décisionnels suivants, qui permettent selon les circonstances de changer comment et dans quel but l’actif est utilisé, alors on pourrait conclure qu’il a le droit de diriger l’utilisation de l’actif :

a. le droit de modifier le type de production de l’actif (par exemple, décider d’utiliser un conteneur pour transporter ou pour stocker des marchandises) ;

b. le droit de changer quand les biens / les services sont produits / réalisés (par exemple, décider quand une centrale électrique est utilisée) ;

c.le droit de changer le lieu où la production / le service est réalisé(e) (par exemple, décider de la destination d’un camion ou d’un navire) ; et

d.le droit de modifier si les biens / les services sont produits / réalisés et ce, en quelle quantité (par exemple, décider de produire l’énergie depuis une centrale et décider de la quantité d’énergie produite

Si le client a le droit d’utilisation et que les autres critères sont remplis, il s’agit d’un contrat de location. Si par contre, le fournisseur a le droit de diriger l’utilisation, alors le contrat doit être traité totalement comme un contrat de prestations de services.

Dans certains contrats, les  décisions pertinentes sur « comment et dans quel but » l’actif est utilisé sont prédéterminées. Aussi convient-il de poursuivre l’analyse en examinant qui a le droit d’exploiter l’actif (ou de diriger un tiers pour l’exploiter selon son souhait) pendant la période d’utilisation sans que le bailleur puisse modifier ses instructions relatives à l’exploitation; ou, qui a conçu l’actif de manière à déterminer comment et dans quel but l’actif sera utilisé pendant la période d’utilisation. 

Un contrat peut inclure certaines clauses restrictives visant à protéger les intérêts du bailleur dans l’actif identifié, à protéger ses équipes ou assurer le respect par le bailleur des lois et règlements applicables. Ces droits protectifs définissent généralement la portée du droit du preneur à utiliser un actif mais ne l’empêchent pas, à eux seuls, d’avoir le droit de diriger l’utilisation de l’actif dans la limite définie. C’est le cas par exemple lorsque le contrat:

  • spécifie la limite maximum d’utilisation d’un actif, ou bien, où et quand le preneur peut utiliser l’actif;
  • exige qu’un preneur suive certaines pratiques opérationnelles particulières ; ou
  • exige qu’un preneur informe le fournisseur de changements relatifs à la manière dont un actif sera utilisé

Nous venons donc de décortiquer la nouvelle définition des contrats de location dans le référentiel comptable de l’ OHADA. Cet article nous a semblé indispensable car les détails ici présents ne sont pas inclus dans le référentiel. Nous ne pouvons terminer sans préciser que cette nouvelle définition ne s’applique pas aux:

  • contrats d’une durée inférieure ou égale à 12 mois et sans option d’achat;
  • contrats dont les actifs sont présumés de faibles valeurs (matériel informatique, matériel et mobilier, véhicules de tourisme par exemple;
  • contrats dont la levée d’option est hypothétique (prix de levée d’option assez élevé, par exemple 30% du prix d’achat, ou Décision du preneur de ne pas lever l’option en fin du contrat).

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La quotité cessible : Quel cadre juridique et comment la déterminer ?

Définition

La quotité cessible peut être définie comme la portion maximale du salaire qui peut être cédé par un individu pour assurer les remboursements périodiques d’un crédit obtenu auprès d’un établissement de crédit ou de son employeur.

Cadre juridique

Sur le plan juridique, cette notion s’inscrit dans les procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.

L’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution de l’OHADA dans son livre 2, Titre 5, Chapitre 2 aborde le sujet sous le titre de « La cession des rémunérations ».

Au vu des articles 205 à 212 de l’Acte Uniforme ci-dessus cité, on peut comprendre que la loi requiert le respect d’une quotité cessible ou saisissable par l’employeur pour le compte d’un cessionnaire (Banque par exemple), sans toutefois préciser le taux de cette quotité.

Pour retrouver ce taux, il faut aller sur le champ social. En effet, le Code du travail selon les pays, précise la quotité ou renvoie vers une loi ou décret définissant cette quotité.

C’est le cas par exemple au Togo ou le Code du travail dans son article 136 à 138 parle de la notion de quotité cessible ou saisissable tout en renvoyant vers un décret pris par le ministre du travail pour ce qui concerne la détermination de la quotité.

Voir extrait de l’article ci-dessous :

Article 137 : « Un décret pris sur rapport du ministre chargé du travail, après avis du Conseil National du Travail fixe, en tenant compte de la nécessité d’assurer l’entretien du travailleur et de sa famille, les portions y afférentes. La retenue visée à l’article précédent ne peut, pour chaque paie, excéder les taux fixés par ce décret. Les modalités et les limites des saisies et des cessions prescrites par ledit décret sont affichées aux bureaux de l’employeur ou sur les lieux de paie du personnel. »

Comment la déterminer ?

Pour déterminer votre quotité cessible, il faudra dans chaque pays, recourir au décret relatif au sujet en vue d’obtenir les taux préétablis. Le décret du Togo n’est apparemment pas disponible en ligne mais existe forcément puisque le Code du travail le prévoit.

Par contre, nous avons pu retrouver en ligne la quotité définie par le décret n°2008-741 du 17 novembre 2008 au Burkina Faso qui se décline comme suit :

-33,33% pour les salaires compris entre le SMIG (30 684 FCFA) et 75 000 ;
-40% pour les salaires de 75 001 à 100 000 ;
-45% pour les salaires de 100 001 à 200 000 ;
-50% pour les salaires de 200 001 à 300 000 ;
-55% pour les salaires de plus de 300 000.

Si vous posiez la question relative à la quotité cessible, alors, vous avez la réponse. Rapprochez vous du ministère du travail pour avoir le texte précis qui définit les taux et modalités de calcul au niveau de votre pays de résidence.

Les Holding financières dans l’espace OHADA : Quel référentiel applicable et quelles sanctions en cas de défaut d’établissement des Etats financiers selon ce référentiel ?

Définition de la notion de Holding

Un (ou une) holding (mot d’origine anglaise signifiant « tenir, détenir ») est une société qui détient des titres de participation dans une ou plusieurs sociétés en vue de les contrôler. Cette société est qualifiée de pure (ou passive) lorsqu’elle a pour objet unique la détention de titres, et d’impure (ou active) lorsqu’elle a pour objet à la fois la détention de titres et l’exercice d’autres activités de nature industrielle ou commerciale. Très fréquemment, les sociétés Holdings exercent et facturent, pour le compte de leurs filiales, des activités de conseil, de centralisation de la trésorerie, de tenue de la comptabilité et de diffusion d’informations. L’utilisation de la société holding présente des intérêts variés :

– elle facilite la transmission des PME, PMI,

– elle est un instrument de gestion dans les groupes consolidés,

– elle permet le rachat d’une société et notamment la déduction des charges financières liées à l’acquisition (LBO ou Leveraged Buy-Out).

Dès lors qu’il y a holding, on est en présence, au sens fiscal du terme, d’un groupe de sociétés.

Régime juridique de la holding dans l’espace OHADA

  1. Notion de groupe

L’OHADA n’a pas prévu la société holding dans la classification juridique des sociétés. Ainsi, la holding peut revêtir n’importe quelle forme ; les plus répandues étant la SA et la SAS. Le choix d’une structure juridique sera inspiré par les objectifs poursuivis.

Toutefois, l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et GIE (AUSCGIE) de l’OHADA définie la notion de groupe dans son article 173 comme étant l’ensemble formé par des sociétés unies entre elles par des liens divers qui permettent à l’une d’elles de contrôler les autres.

L’article 179 précise quant à lui la notion de société Mère-fille.

Selon cet article, une société est société mère d’une autre société quand elle possède dans la seconde plus de la moitié du capital.

2. Obligation de consolidation

Selon l’article 74 de l’ Acte uniforme relatif au droit comptable et à l’information financière (AUDCIF), toute entité, qui a son siège social ou son activité principale dans l’un des Etats parties et qui contrôle de manière exclusive ou conjointe une ou plusieurs autres entités, doit établir et publier chaque année les états financiers consolidés de l’ensemble constitué par toutes ces entités ainsi qu’un rapport sur la gestion de cet ensemble.

Deux cas d’exemptions d’établissement toutefois :

  • L’entité dominante est contrôlée à son tour par une autre entité de la même région (sous certaines conditions à lire dans l’article 77 de l’AUDCIF)
  • L’entité a une dimension modeste, soit un chiffre d’affaires inférieur à 500 millions F CFA par exercice, pendant deux exercices successifs (Article 95 de l’AUDCIF).

3. Obligation d’établissement d’états financiers (individuels/Consolidés)

L’article 111 de l’AUDCIF prévoit des sanctions pénales aux dirigeants des sociétés au sens de l’article 2, en cas de non-respect des obligations d’établissement d’Etats financiers. Le contenu de l’article 2 est présenté ci-après :

« Sont astreintes à la mise en place d’une comptabilité, dite comptabilité financière, les entités soumises aux dispositions de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général, de l’ Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique et de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés coopératives, les entités publiques, parapubliques, d’économie mixte et, plus généralement, les entités produisant des biens et des services marchands ou non marchands, dans la mesure où elles exercent, dans un but lucratif ou non, des activités économiques à titre principal ou accessoire qui se fondent sur des actes répétitifs, à l’exception de celles soumises aux règles de la comptabilité publique. »

Ces textes suscitent une double observation :

  • les sanctions évoquées ci-dessus (art 111) ne sont pas celles applicables à la personne morale d’une entité mais à la personne physique de ses dirigeants ;
  • L’article 2 fait référence dans sa 1ère partie aux entités soumises à des droits et non à des référentiels.

Ainsi donc, nous dissocierons la question du référentiel applicable de celle de la sanction applicable à la personne morale que constitue une holding bancaire.

Quel référentiel applicable à une holding bancaire dans l’espace OHADA ?

Notre argumentaire partira du cadre juridique des compagnies financières dans notre espace.

En effet, la notion de compagnies financières, n’a pas du tout été abordée ni par l’AUSCGIE, ni par l’AUDCIF. Ainsi donc, on ne dispose pas dans le droit OHADA, d’une définition de cette notion.

Par contre, cette notion a été clairement définie dans la « Décision N° 014/24/06/2016/CM/UMOA relative à la supervision sur base consolidée des établissements de crédit maisons-mères et des compagnies financières dans l’union monétaire ouest africaine (UMOA) ».

Selon cette décision, les Compagnies financières sont des sociétés ayant pour activité principale de prendre et gérer des participations financières et qui, soit directement, soit par l’intermédiaire de sociétés ayant le même objet, contrôlent une ou plusieurs sociétés effectuant des opérations à caractère financier dont une, au moins, est un établissement de crédit.

Elles sont subdivisées en deux catégories, comme suit :

  • Compagnie financière holding : une entité non agréée en tant qu’établissement de crédit et qui est la maison-mère d’un groupe bancaire ;
  • Compagnie financière holding intermédiaire : une entité non agréée en tant qu’établissement de crédit et qui détient l’ensemble des participations d’un groupe dans ses filiales, établissements de crédit, opérant dans l’UMOA.

L’instruction N° 35-11-2016 de la BCEAO relative à l’établissement et à la publication des états financiers individuels et consolidés cite dans son article 1er les compagnies financières comme étant des établissements assujettis. Dans les articles 4 et 9 de la même instruction, il est précisé l’obligation des établissements assujettis de publier leurs comptes individuels et consolidés conformément au Plan comptable bancaire révisé de l’UMOA et à l’instruction de la banque centrale, en ce qui concerne les comptes consolidés.

Eu égard à ce qui précède, l’établissement des Etats financiers individuels et consolidés d’une holding bancaire (compagnie financière) est du ressort du droit bancaire et non du droit général OHADA.

Il faut noter que le droit OHADA n’intervient dans le secteur bancaire que pour les textes qui n’ont pas été formellement précisés dans le dispositif bancaire. Ce dernier renvoie d’ailleurs par moment vers ce droit général sur certains sujets.

Quelles sanctions applicables à une holding bancaire en cas de défaut d’établissement des Etats financiers conformément au référentiel qui lui est applicable ?

Eu égard au droit OHADA, nous répondrons : Aucune pour la personne morale que constitue la Holding mais sanction pénale pour ses dirigeants.

Pour expliquer notre point de vue, retournons à nos deux précédentes observations

  • les sanctions évoquées par l’article 111 ne sont pas celles applicables à la personne morale mais à la personne des dirigeants.La Holding en tant que personne morale n’est donc pas concernée par cet article. Par contre, elle n’échappe pas, bien entendu, aux sanctions provenant des autorités de supervision bancaire. Ces sanctions partent du simple avertissement au retrait de l’agrément bancaire.
  • L’article 2 fait référence dans sa 1ère partie aux entités soumises à des droits et non à des référentiels.

La question est donc de savoir si les compagnies financières sont soumises au droit commercial général de l’OHADA ou encore à l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique de l’OHADA ?

Notre réponse sera « Oui ! », les holdings sont avant tout des sociétés ayant une des formes juridiques prévues dans le droit OHADA et qui se retrouvent ainsi régies par ces textes dans leur fonctionnement.

Si tel est le cas, alors, on pourrait répondre sans hésiter que les sanctions de l’article 111 de l’AUDCIF sont applicables aux dirigeants de la Holding bancaire qui n’établit pas ses comptes individuels et consolidés conformément au référentiel qui lui est applicable en fonction de son espace économique (Plan comptable bancaire de l’UMOA ou Plan comptable des Etablissements de crédits dans la CEMAC).

Engagements en souffrance et dépréciations dans la Zone UMOA: Changements majeurs

Jusqu’au 31 décembre 2017, le dispositif applicable aux engagements des établissements de crédit s’articulait autour de l’Instruction n°94-05 relative à la comptabilisation et au provisionnement des engagements en souffrance et du dispositif prudentiel entré en vigueur le 1er janvier 2000.

Les changements intervenus à travers la nouvelle instruction n°026-11-2016 du 15 novembre 2016 relative à la comptabilisation et à l’évaluation des engagements en souffrance qui est en vigueur depuis le 1er janvier 2018 s’expliquent essentiellement par la nécessité d’aligner le traitement des créances en souffrance sur les pratiques admises au niveau international. Aussi, il faut dire que la définition que donne Bâle 2 des créances en souffrance oblige à revoir les règles existantes.

Selon les dispositions de Bâle 2 : « un défaut de la part d’un débiteur intervient lorsque l’un des deux événements ci-dessous se produit, sinon les deux :

  •  la banque estime improbable que le débiteur rembourse en totalité son crédit au groupe bancaire sans qu’elle ait besoin de prendre des mesures appropriées telles que la réalisation d’une garantie (si elle existe) ;
  • l’arriéré du débiteur sur un crédit important dû au groupe bancaire dépasse 90 jours. Les découverts sont considérés comme des créances échues dès que le client a dépassé une limite autorisée ou qu’il a été averti qu’il disposait d’une limite inférieure à l’encours actuel ».

De cette nouvelle définition, on peut tirer les observations suivantes :

  • Une créance est considérée comme douteuse lorsqu’elle est échue depuis plus de 3 mois. Précisons que le délai était de 6 mois jusqu’au 31/12/2017. La conséquence, toutes choses restant égales par ailleurs est que le niveau des dépréciations augmente avec les nouvelles dispositions.
  • Il faut toutefois noter que cette augmentation est mitigée par l’élargissement du champ des garanties éligibles au plan prudentiel, la prise en compte des paramètres de retour à meilleure fortune du client (reclassement en sain des créances douteuses sous certaines conditions) ainsi que l’obligation nouvelle consistant à reclasser en créances irrécouvrables les créances douteuses depuis 5 ans au moins.
  • Indépendamment des règles basées sur le nombre de jour d’impayés, tout indice de défaillance d’une contrepartie pourra conduire à une dépréciation.

Par ailleurs, en parcourant les nouvelles dispositions, on ne peut pas ne pas remarquer les changements suivants:

1. Créances impayés et immobilisées :

  • Le 1er changement remarquable est que les créances immobilisées ont été supprimées et traitées dans le cadre global des créances restructurées.
  • Les créances impayées quant à elles ne sont plus considérées comme des créances en souffrance. Elles sont classées en créances saines tant qu’elles ne remplissent pas les conditions pour être déclassées en douteux.

2. Créances en souffrance

La notion de risques pays a été supprimée. Désormais, les créances en souffrance sont constituées uniquement des créances restructurées et des créances douteuses et litigeuses.

3. Créances restructurées

Les créances restructurées font l’objet désormais d’une définition plus précise (Distinction faite entre Renégociation et Restructuration) et d’un traitement plus clair. En effet, une créance restructurée est caractérisée par l’existence d’une difficulté financière au niveau du client et d’une concession faite par la banque sur les termes du contrat, permettant au débiteur de payer sa dette. Aussi, une créance restructurée fait globalement 3 ans sous ce statut (maintenue d’abord en créances en souffrance pendant 1 an avant d’être reclassée en créance saine sous la qualification de restructurée pendant une période d’observation de 2 ans pendant lesquelles tout impayé de plus de 30 jours entraine un reclassement en douteux).

Il faut noter, en termes de nouveautés, l’obligation de comptabiliser en coût du risque une décote dès lors qu’il y a restructuration. Cette décote correspond à la perte qu’enregistre la banque du fait d’abandon d’une partie du capital/intérêts ou de la modification des flux contractuels liés à la restructuration elle-même. Concrètement, il faut faire la différence entre à la valeur actualisée des flux liés au tableau d’amortissement initial avant restructuration et la valeur actualisée des flux issus du nouveau tableau d’amortissement après restructuration. L’actualisation doit se faire au TIE (Taux d’intérêt Effectif) d’origine, notion importée des IFRS.

4. Créances douteuses et litigieuses

Les créances douteuses ou litigieuses sont régies par les dispositions de l’article 8 de l’Instruction n°026-11-2016 susvisée et sont constituées par :

  • les créances sur une contrepartie présentant des caractéristiques telles qu’indépendamment de l’existence de tout impayé, il est probable que l’établissement ne perçoive pas tout ou partie des sommes dues au titre des engagements souscrits par la contrepartie ;
  • les créances dont au moins une échéance est restée impayée depuis plus de quatre-vingt- dix (90) jours (seuil porté à 180 jours en ce qui concerne les PME/PMI et les entités du secteur public).
  • Pour les comptes ordinaires débiteurs (COD), l’ancienneté de l’impayé est décomptée dès que la contrepartie a dépassé une limite qui a été portée à sa connaissance par l’établissement assujetti ou que la contrepartie a tiré des montants sans autorisation de découvert. On peut remarquer que les règles de dépréciation des COD 3 mois sans mouvement créditeur ou 6 mois sans mouvement créditeur significatif ne sont plus d’actualité.
  • Désormais, les seuls COD considérés sont les découverts qui ont dépassé les limites autorisées ou qui sont tirées sans autorisation de découvert, et les COD 3 mois ne se retrouvant pas dans la catégorie précédente et qui sont sans mouvements créditeurs significatifs depuis plus de 3 mois. Ils sont à ce titre traités comme des créances douteuses.

5. Garanties éligibles

Désormais, les hypothèques de 2ème rang ne sont admises à titre de garantie réelle que si le 1er rang a été constitué au profit du même établissement de crédit. Ceci restreint le champ d’utilisation des Hypothèques.

Les garanties prévues par le dispositif prudentiel sont définies dans l’instruction relative à la définition des attributs sous le point 10. Je note l’élargissement à de nouvelles formes de garanties, notamment :

  • les titres de dettes respectant certains critères ;
  • les actions ou obligations convertibles en actions remplissant certaines conditions ;
  • les parts ou actions d’OPCVM et de FI respectant certaines conditions.

Par ailleurs, on note une certaine flexibilité, notamment au niveau des dépôts en espèce qui sont éligibles à condition bien sûr d’être nantis.

Aussi, en ce qui concerne les garanties à 1ère demande, la liste des garants éligibles a été élargie…

6. Dépréciation des créances douteuses et litigieuses

Les dépréciations de créances douteuses sont plus étalées dans le temps. En effet, la partie de la créance non couverte par des garanties éligibles doit faire l’objet d’une dépréciation de 20% à la date de déclassement, 50% au moins dans 3 mois et 100% dans 9 mois. Cette mesure permet, toutes choses étant égales par ailleurs, de réduire le coût du risque supporté sur un exercice en l’étalant dans le temps.

Pour la partie couverte par des garanties, la dépréciation est facultative pendant les deux 1ères années à compter de la date de déclassement. Elle doit couvrir 50% à partir de la 3ème année et 100% à partir de la 4ème année. Cette disposition est la même que dans l’instruction 94-05 à la différence que ce n’est plus forcément au terme des 3ème et 4ème années mais à tout moment dès lors qu’on passe respectivement les 2ème et 3ème années.

L’autre nouveauté est que les créances douteuses et litigieuses peuvent être reclassées en créances saines lorsque le crédit se dénoue normalement (montant + échéances respectées) sur une période d’un an. Le crédit est toutefois toujours qualifié de douteux pendant une période d’observation dite de « probation » de deux ans après le transfert en créances saines. C’est ce qu’on appelle le retour à meilleure fortune.

Une autre précision que j’ai noté est l’impossibilité de déprécier une créance sans au préalable la déclasser en douteux. On peut toutefois déclasser sans déprécier suivant des conditions spécifiques.

Les engagements hors bilan qui s’avèrent douteux doivent faire l’objet de provision pour leur totalité en tenant compte des garanties éligibles.

Exemptions :

Sont exemptés de la dépréciation :

  • les risques directs sur les Etats de l’UMOA, et organismes publics hors administration centrale des Etats de l’UMOA, ainsi que les risques garantis par ces mêmes agents économiques;
  • les créances restructurées.

7. Application des règles de contagion

La contagion s’applique comme avant mais avec deux exceptions (Article 11 de l’instruction n°26-11-2016) :

  • Les créances résultant d’un escompte commercial et,
  • les encours portés sur la clientèle de détail (Les critères d’éligibilité en clientèle de détail sont précisés dans le nouveau dispositif prudentiel).

A suivre…..