Le COVID -19 comme Evènement postérieur à la clôture de l’exercice : Quel impact sur les comptes clos au 31 décembre 2019 ?

Le Syscohada révisé, en accord avec la norme IAS 10, distingue deux types d’évènements subséquents :

  • Ceux qui contribuent à confirmer des situations qui existaient à la fin de la clôture de l’exercice (évènements subséquents donnant lieu à des ajustements) ; et
  • Ceux qui indiquent des situations apparues postérieurement à la fin de la clôture de l’exercice (évènements subséquents ne donnant pas lieu à des ajustements).

COVID -19 : Quel type d’évènement subséquent ?

L’on ne peut répondre à cette question sans s’en poser une au préalable.

De quel événement parle-t-on ?

Es ce le déclenchement de la crise sanitaire elle-même ou plutôt les mesures prises pour y pallier par les Etats ?

Analysons un peu.

Pour conduire notre analyse, retraçons d’abord les événements de façon chronologique

Rappelons d’abord que la crise sanitaire a eu pour effet des décès en cascade mais n’a jamais été en soi l’événement déclencheur des difficultés que les entreprises connaissent actuellement. Des virus tuent des populations dans le monde entier et particulièrement en Afrique depuis toujours. Mais qu’est-ce qui change cette fois-ci ?

Eh bien c’est le fait que l’OMS considère ce virus ci comme une pandémie entraînant des mesures sans précédents impactant l’activité économique.

L’évènement clé selon nous part donc de la date à laquelle les Etats ont pris des mesures permettant d’empêcher la propagation du virus et ont sorti des décrets ou ordonnances portant entre autres :

  • Confinement total ou partiel ;
  • Fermeture des commerces non indispensable ;
  • Fermeture des frontières terrestres et aériennes ;
  • Couvre-feu ;
  • Etc…

Il est donc important de ne pas aller chercher la date de naissance de la situation actuelle en se référant au début de la crise sanitaire. Ce ne serait pas faux mais ; au sens comptable, ce serait biaisé.

De quand datent ces mesures ?

Il est clair que l’analyse doit se faire pays par pays. Toutefois, la crise s’étant réellement déclenchée au niveau mondial en janvier 2020 bien entendu après les premiers cas constatés en Chine en décembre, il va de soi que les mesures prises par les gouvernements datent de 2020, à part peut-être pour la chine.

Il en ressort que nous sommes en présence d’un événement postérieur à la clôture de l’exercice indiquant des situations apparues postérieurement à la fin de la clôture de l’exercice pour la plupart des pays.

Traitement comptable

Conformément au Syscohada révisé (inspirée de la norme IAS 10), ces évènements n’entraineront pas d’ajustement des comptes clos au 31 décembre 2019.

Une information en annexe s’avèrera toutefois obligatoire, la crise en cours étant un évènement significatif. Les entités devront notamment communiquer sur :

  • la nature de l’évènement ;
  • une estimation de son effet financier ou l’indication que cette estimation ne peut être fournie ;
  • les mesures prises pour le juguler.

Exemple d’informations à fournir en annexe

  • Baisse du chiffre d’affaires et des prévisions de flux de trésorerie, annulation de commandes,
  • Fermetures d’usines, d’établissements ou de magasins, diminution de la production, sous-activité,
  • Rupture dans la chaîne d’approvisionnement,
  • Report d’investissements, de projets,
  • Allongement des délais de paiement des créances,
  • Rupture de covenants,
  • Incapacité à lever des financements,
  • Chômage partiel des employés,
  • Nouveaux engagements donnés/reçus,
  • Indemnités d’assurance et aides gouvernementales reçues/à recevoir

Exemple de comptes susceptibles d’être impactés par la crise

  • Evaluation des stocks à la clôture

Selon le Syscohada (s’inspirant de la norme IAS 36), les entités doivent dérouler un test de dépréciation dès lors qu’il existe des indices de perte de valeur à la clôture. Dans le cas particulier des stocks, il est précisé que leur évaluation se fait à la clôture en considérant leur valeur nette de réalisation ; autrement dit le prix auquel ces stocks seront vendus en N+1 tout en déduisant les frais de vente.

Partant de cette définition, l’évaluation des stocks devient un point d’attention.

En effet, du fait de la crise, les stocks existants à la clôture pourraient perdre de la valeur parce que ne pouvant plus être vendus à leur prix initial ou carrément générant des pertes entières du fait de leur caractère périssables. Il serait donc bien de renseigner la perte attendue sur les stocks dans les annexes des comptes clos au 31 décembre 2019.

  • Evaluation des créances clients

La faillite d’un client survenant dans le contexte de la crise en 2020 doit amener à déprécier sa créance existante lors des arrêtés intermédiaires.

S’il s’agit du seul client de l’entité ou celui représentant l’essentiel de son chiffre d’affaires alors, on pourra considérer que la continuité d’exploitation est compromise. Sinon, il conviendrait simplement de déprécier cette créance si son montant est considéré comme matériel pour l’entité. La notion de matérialité évoqué ici fait référence au principe de l’importance relative.

  • Provisions au passif

Le COVID -19 entraîne déjà des restructurations au niveau de diverses entreprises (chômage partiel, licenciement, etc.)

Les restructurations donnent lieu à une provision selon le Syscohada révisé qui s’est inspiré de la norme IAS 37.

Toutefois, étant donné que la restructuration est liée à des mesures prises en 2020 par le gouvernement, il n’y aura pas lieu d’ajuster les comptes au 31 décembre 2019. Par contre le coût de la restructuration si possible devra être évalué et renseigné dans les notes annexes et le rapport de gestion à la clôture. La provision devra être passée dans les comptes lors du prochain arrêté intermédiaire.

  • Contrats à long terme

Les contrats à long terme peuvent engendrer du fait de la crise, des pertes à terminaison du fait de la hausse du coût des matériaux ou de pénalités liées au non-respect du contrat. Dans ce cas, une provision pour perte devra être constituée lors de prochains arrêtés intermédiaires. Déjà au 31 décembre 2019, dans les notes annexes, cet impact pourra être évalué en renseigné par la société prestataire.

Presque tous les comptes pourront être impactés mais nous vous laissons faire l’analyse au complet et relever ce qui a réellement un impact matériel pour vous.

Que faire si les comptes ont été déjà arrêtés par le Conseil d’administration ?

Il y a certainement des sociétés qui ont déjà arrêté leur compte avant que la crise ne prenne toute son ampleur. Il est donc possible qu’aucune information relative à la crise sanitaire ne soit mentionnée dans les notes annexes des Etats financiers arrêtés par le Conseil d’administration.

Que faire dans ce cas ?

A notre avis, deux options s’offrent aux entités :

  • Première option : Faire un second arrêté avant la tenue de l’Assemblée Générale (AG).

Cela permettra de renseigner les informations manquantes si elles sont réellement d’ordre significatif. En cas de continuité d’exploitation compromise par exemple, cela permettra d’arrêter les comptes revus sur base liquidative.

  • Deuxième option : On se limite à l’arrêté initial mais on intègre cette information dans le rapport de gestion qui sera soumise à l’ AG.

Le commissaire aux comptes, dans les deux cas, doit faire une observation dans son rapport et faire faire une déclaration par la Direction de l’entité dans la lettre d’affirmation concernant l’impact du Covid 19 sur la vie et les comptes de l’entité.

Voilà pour notre contribution. Nous espérons que cela vous aidera en ces moments où chacun est acharné à faire l’essentiel pour publier ses comptes dans les délais requis.

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