Les dates clés dans le cadre d’un arrêté comptable

La vie comptable d’une société est un cycle en perpétuel recommencement et une corde sans fin au bout de laquelle il faut tisser de nouvelles.

La gouvernance n’est, en effet, pas réservé qu’aux matières de pure management. Elle est également applicable à la comptabilité. Ce que j’appelle la « Gouvernance comptable » est ce processus qui permet de passer d’une transaction comptable à des Etats financiers publiables.

Dans ce processus, il y a des dates clés à retenir. Ces dates sont d’une importance capitale non seulement pour le comptable, mais aussi pour toutes les autres parties prenantes de l’entité.

Cet article a pour objectif de mettre en exergue ces dates clés, leur importance et les conséquences liées à leur non-respect.

1. « Date de saisie » d’une écriture comptable versus « Date de l’opération ou transaction comptable » :

La date de saisie d’une écriture comptable est la date à laquelle le comptable de la société passe l’écriture dans le système comptable. Cette date est à distinguer de la date de l’opération comptable qui est la date réelle de l’opération qui fait l’objet de comptabilisation.

Exemple : La société BRUKOAK a acheté des ordinateurs pour un montant de 500 000 F CFA le 5 novembre 2019. Le comptable de la société saisit l’opération dans le logiciel comptable le 10 novembre 2019.

Dans cet exemple, la date de l’opération est le 05 novembre alors que la date de saisie est le 10 novembre, soit un décalage de 5 jours.

Quelle est l’utilité de cette distinction ?

En effet, selon l’article. 15 de l’Acte Uniforme relatif au Droit Comptable et à l’Information financière (AUDCIF), l’organisation comptable doit assurer :

  • un enregistrement exhaustif, au jour le jour, et sans retard des informations de base ;
  • le traitement en temps opportun des données enregistrées ;
  • la mise à la disposition des utilisateurs des documents requis dans les délais légaux fixés pour leur délivrance.

Un bon système d’information comptable permet justement de retracer les dates et heures de saisies des opérations, ainsi que l’identité des personnes les ayant saisies. Cela permet de mettre en place les contrôles nécessaires pour éviter les déviations liées aux enregistrements tardifs et de situer les responsabilités au cas échéant.  Il faut noter que l’étape zéro d’une comptabilité saine est la saisie adéquate et à bonne date des opérations comptables.

2. »Date de clôture » des comptes versus « Date d’arrêté » des  comptes

L’AUDCIF dans son article 7 stipule que l’exercice comptable coincide avec l’année civile. Autrement dit, la date de clôture de l’exercice est fixée au 31 décembre de chaque année. Le principe de « spécialisation des exercices » conduit à rattacher à l’exercice toutes les charges et tous les produits le concernant et ceux-là seulement.

L’arrêté des états financiers est du ressort des organes dirigeants.

La date d’arrêté des états financiers par les organes dirigeants, légalement responsables, ne peut être que postérieure de plusieurs semaines, voire plusieurs mois, à la date de clôture, la limite fixée par l’ AUDCIF étant de quatre mois après la clôture, soit à fin avril.

Au cours de la période d’arrêté, l’entreprise rassemble toutes informations nécessaires à la régularisation des comptes (inventaire extra-comptable, évaluations, recensement des risques, etc.) ; prépare et établit les les états financiers annuels.

Dans les sociétés de personnes, le gérant a le pouvoir d’arrêté les comptes. Dans les sociétés de capitaux, le conseil d’administration (SA avec CA) ou le conseil de surveillance (SA avec CS) ou le président (SAS) ont la responsabilité d’arrêté les comptes. Ces derniers le font sur la base du rapport du Commissaire aux comptes prévus à l’article 715 de l’Acte Uniforme relatif aux sociétés commerciales et du GIE.

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3. »Date d’approbation » versus « Date de publication » des comptes

La date d’approbation est celle de la décision d’adoption des états financiers par les associés (cas des sociétés). Elle doit intervenir dans les six mois à compter de la date de clôture de l’exercice i.e. au plus tard le 30 juin de chaque année. L’approbation des comptes est du ressort de l’assemblée générale des associés ou des actionnaires.

La date de publication des états financiers est postérieure à la précédente et recouvre des acceptions diverses, plus ou moins larges, qui supposent la définition des destinataires (actionnaires, épargne publique, administration fiscale, autres administrations, centrale des bilans, etc.). Elle est d’une importance capitale pour les entités côtés devant rendre disponible les données financières aux investisseurs actuels et potentiels ainsi que d’autres parties prenantes.

Il se pose toutefois une question. Quelle est la place du dépôt des Etats financiers auprès de l’administration fiscale?

Dans plusieurs pays, ce délai est fixé au 30 avril N+1 avec possibilité de prorogation d’un mois maximum. Ce qui veut dire que globalement, les comptes déposés en l’état sont publiés auprès de ce destinataire spécifique avant même d’être approuvés dans la plupart des cas, par l’assemblée générale des actionnaires/associés…. Est-ce à dire que l’administration fiscale prend consciemment le risque de recevoir des Etats financiers qui peut-être subiront des changements entre la date d’arrêté et celle d’approbation comme nous le verrons dans le paragraphe suivant ? En tout cas, la question est posée. A elle de répondre…

4. La prise en compte des événements postérieurs à la clôture de l’exercice

L’application du principe de prudence conduit à prendre en considération des événements survenus après la date de clôture et avant la date d’arrêté des comptes (article 49).

Par ailleurs, bien que les comptes aient été arrêtés, une obligation d’information des associés incombe aux dirigeants des sociétés (SA, SARL), sous certaines conditions, en ce qui concerne la période séparant la date d’arrêté des comptes de la date de l’Assemblée générale.

5. Comment s’organiser pour respecter ces dates clés.

Maintenant que nous avons fait le tour des dates clés, il est nécessaire de trouver des moyens pour les respecter autant que faire se peut.

Il est de coutume que les entreprises établissent ce qu’on appelle un « Calendrier d’arrêté des comptes ». Il s’agit d’un rétroplanning qui part de la date de publication prévue des comptes à la date d’impression de la balance avant inventaire.

6. Quelles conséquences du non -respect de ces délais?

Les dirigeants sociaux peuvent être poursuivis pour non-respect de ces délais au cas où les utilisateurs de l’information financière estiment avoir subit des dommages/préjudices du fait de ce retard.

le dépôt tardif des Etats financiers à l’administration fiscale entraîne des pénalités financières. C’est la même logique en ce qui concerne les marchés financiers. Mais encore plus pour ces derniers car un retard peut inquiéter les investisseurs qui vont peut-être commencer par céder leur actions créant ainsi un mouvement de panique qui fait chuter le cours de l’action de l’entité.

Au niveau de l’OHADA, le non-respect du délai légal de tenue des assemblées générales doit faire l’objet d’une demande de prorogation de délai par décision de justice (Article 548 de l’AUSCGIE).

Voilà, je vous souhaite une bonne fin d’année 2019, une clôture des comptes sans soucis, un arrêté des comptes paisible, un dépôt aux fiscs sans retard et une approbation des comptes sans besoin de prorogation. Pour ce qui est des événements postérieurs à la clôture, on s’en donne à Dieu!

Bonne année 2020 par anticipation!

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La capitalisation des coûts d’emprunt selon le Syscohada révisé

Il arrive, dans la phase de croissance ou même d’implantation d’une entreprise, que ses promoteurs soient obligés de recourir à un financement externe, notamment auprès de bailleurs internationaux ou de banques locales. Ces financements peuvent être directement affectés à un investissement ou plutôt être d’ordre général. Selon le cas, la société devra s’assurer d’un traitement adéquat des coûts liés à ce financement au niveau comptable.

La question du traitement comptable des coûts d’emprunt a été abordée par la norme IAS 23 dont la version révisée est entrée en vigueur depuis janvier 2009. La révision récente du Syscohada a permis à notre Espace de rattraper le train.

Il faut toutefois préciser que la norme IAS 23 s’appliquait déjà sous l’ancien référentiel mais n’était qu’une autorisation. Aujourd’hui, elle n’est plus une option mais bien une obligation, sauf cas d’exclusions prévus.

Dans cet article, nous allons essayer de comprendre de façon un peu plus pratique cette notion.

  1. La notion de coût d’emprunt

Selon l’ IAS 23, les coûts d’emprunt  sont les intérêts et autres coûts qu’une entité encourt dans le cadre d’un emprunt de fonds.

Le Syscohada révisé, reprenant la même définition, précise qu’ils peuvent inclure, notamment :

  • les charges d’intérêts sur les découverts bancaires, les crédits à court, moyen ou long terme ;
  • les charges financières en rapport avec les contrats de location-acquisition ;
  • les différences de change résultant des emprunts en devises, dans la mesure où elles sont assimilées à un ajustement des coûts d’intérêts

Dans la pratique, on peut également noter des charges telles que :

  • l’amortissement des primes d’émission ou de remboursement relatives aux emprunts. Exemple : Commissions d’engagement ou d’arrangement.
  • l’amortissement des coûts accessoires (honoraires et commissions dus au prêteur) encourus pour la mise en place des emprunts.

Tous ces coûts sont, en temps normal, considérés comme des charges. Cependant, lorsqu’ ils se rapportent à un actif qualifié, ils devront faire l’objet de capitalisation.

  • Qu’est-ce donc qu’un actif qualifié ?

Un actif qualifié à la capitalisation des coûts d’emprunt est un actif qui exige une longue période de préparation avant de pouvoir être utilisé ou vendu. Le Syscohada n’est pas ferme sur la définition de la notion de « longue période » mais donne à titre d’exemple une durée supérieure ou égale à 12 mois. L’ IAS 23 est plus précis en considérant comme étant longue, une durée supérieure à 12 mois. Il se pose ainsi une petite contradiction entre la norme originale et sa transposition dans le Syscohada sur ce point spécifique.

Concrètement, si l’on emprunte de l’argent pour financer la construction d’un bâtiment dont les travaux sont prévus pour au plus douze mois, on n’aura pas l’obligation de capitaliser les coûts d’emprunt. Cependant,si les travaux sont prévus sur plus de 12 mois, sous réserve du respect des autres critères, et du jugement du management, les coûts liés à l’emprunt servant à financer ce bâtiment devront être intégrés dans la valeur du bâtiment.

Exemple d’actifs susceptibles d’être qualifiés :

  • stocks ;
  • installations de fabrication ;
  • installations de production d’énergie ;
  • immeubles de placement ;
  • immobilisations incorporelles (pendant la phase de développement) ;
  • contrats de construction comptabilisés  selon les dispositions relatives aux contrats pluri-exercices (Travaux BTP).
  • Les frais d’étude et d’ingénierie pour les services informatiques, les infrastructures et les ouvrages d’art.
  • Les stocks fabriqués à la commande sur un cycle de plusieurs mois.
  • Les stocks portéssur une longue période (tels que champagnes, cognacs et autres alcools).
  • Etc..

Notion de jugement

Le Syscohada autorise une part de jugement dans l’application de cette règle.

Ainsi par exemple, un actif qui nécessite une période de préparation supérieure ou égale à une année devrait en principe répondre à la définition d’un actif qualifié. Mais cette période peut être inférieure à 12 mois si l’entité juge celle-ci significative. Dans ce cas, elle est tenue de justifier son choix par une mention dans les notes annexes.

En conséquence, seront considérés par exemple comme des actifs qualifiés :

  • des avions et bateaux destinés à la vente dont la durée de construction est de 2 ans ;
  • un  immeuble de bureaux en construction,  destiné  à  être loué  et  dont la  durée de construction est de 18 mois ;
  • l’extension d’un entrepôt dont la durée prévisionnelle de construction est de 1 an.

Exclusions

Ne sont pas des actifs qualifiés :

  • les actifs financiers, notamment les prêts et autres créances ;
  • les autres actifs tels que les stocks fabriqués de façon régulière ou produits de façon répétitive en grandes quantités, sur une courte période ;
  • les actifs prêts à être utilisés ou vendus, au moment de leur acquisition.
  • Quels coûts d’emprunt faut –il incorporer dans le coût d’un actif

Il faut distinguer deux scenarios.

Scenario 1 : L’emprunt a été fait pour financer un investissement spécifique

Dans la mesure où une entité emprunte des fonds spécifiquement en vue de l’obtention d’un actif qualifié, l’entité doit déterminer le montant des coûts d’emprunt incorporables au coût de l’actif comme étant égal aux coûts d’emprunt réels encourus sur cet emprunt au cours de la période, diminués de tout produit obtenu du placement temporaire de ces fonds empruntés.

Scenario 2 : L’emprunt n’a pas été affecté à un projet/investissement spécifique

Dans la mesure où une entité emprunte des fonds de façon générale et les utilise en vue de l’obtention d’un actif qualifié, elle doit déterminer le montant des coûts d’emprunt incorporables au coût de l’actif en appliquant un taux de capitalisation aux dépenses relatives à l’actif. Ce taux de capitalisation doit être la moyenne pondérée des coûts d’emprunt applicables aux emprunts de l’entité en cours au titre de la période, autres que les emprunts contractés spécifiquement dans le but d’obtenir l’actif concerné.

C’est le cas par exemple des groupes qui adoptent le Cash-pooling comme stratégie de gestion de trésorerie.

Check point

Le montant des coûts d’emprunt qu’une entité incorpore au coût de l’actif au cours d’une période donnée ne doit pas excéder le montant total des coûts d’emprunt qu’elle a encourus au cours de cette même période.

  • 4.    Quelle Période retenir pour l’incorporation ?

Début de l’incorporation dans le coût d’un actif

La date de commencement pour l’incorporation à l’actif est la date à laquelle l’entité remplit pour la première fois toutes les conditions suivantes:

  • elle encourt des dépenses pour l’actif ;
  • elle encourt des coûts d’emprunt ; et
  • elle entreprend des activités indispensables à la préparation de l’actif préalablement à son utilisation ou à sa vente.

Suspension de l’incorporation dans le coût d’un actif

Les entités doivent suspendre l’incorporation des coûts d’emprunt pendant les périodes longues au cours desquelles elles interrompent le développement actif d’un actif qualifié.

Arrêt de l’incorporation dans le coût d’un actif

Les entités doivent mettre fin à l’incorporation des coûts d’emprunt lorsque les activités indispensables à la préparation de l’actif préalablement à son utilisation ou sa vente prévue sont pratiquement toutes terminées.

Lorsqu’une entité termine la construction d’un actif qualifié par parties et que chacune des parties constitutives, dont la construction se poursuit, est utilisable indépendamment des autres, elle doit cesser d’incorporer les coûts d’emprunt dans le coût de cette partie lorsqu’elle termine pratiquement toutes les activités indispensables à la préparation de cette partie préalablement à son utilisation ou à sa vente prévue.

Exemple : Un terminal à conteneurs dont les 3/4 du quai est terminé et exploitable. Dès lors qu’il y a mise en service partiel, on n’incorporera désormais les coûts que dans la limite du ¼ restant si ce ¼ est considéré comme étant significatif. Au cas contraire, on considérera que les ¾ étant finalisés et représentant la quasi-totalité de la capacité du terminal, on arrête l’incorporation des coûts. Il faudra surtout, dans ce cas, s’assurer du caractère non significatif des coûts liés aux ¼ de travaux en cours.

  • Quel mode de comptabilisation

Le syscohada révisé n’aborde, de façon détaillée, la comptabilisation des coûts d’emprunt.

En se référant à l’ IAS 23, on retient que les entités doivent inscrire à l’actif les coûts d’emprunt qui sont directement attribuables à l’acquisition, la construction ou la production d’un actif qualifié, comme un élément du coût de cet actif. Elles doivent comptabiliser les autres coûts d’emprunt en charges dans la période au cours de laquelle elles les encourent. La norme internationale ne donne pas plus de précision sur le schéma de comptabilisation.De notre analyse, deux schémas peuvent être retenus.

Schéma 1 : On comptabilise l’ensemble des coûts d’emprunt en charges et en fin d’exercice on transfert la quote-part incorporable à l’actif en utilisant notamment le compte de « Transfert de charges d’exploitation »

Schéma 2 : On comptabilise directement la quote –part des coûts incorporable à l’actif en addition à la valeur de l’actif principal. Ainsi, seules les charges non incorporables seront au compte de résultat. De notre analyse, il ressort que ce schéma répond plus à la logique de la norme.

Quel que soit le schéma adopté, l’impact sur le résultat sera le même.

  • 6.    Quelles Informations fournir en annexe ?

Les entités doivent fournir les informations suivantes :

  • le montant des coûts d’emprunt incorporés dans le coût d’actifs au cours de la période ;  et
  • le taux de capitalisation utilisé pour déterminer le montant des coûts d’emprunt pouvant être incorporés dans le coût d’actifs.

Les contrats de location: Nouvelle définition du Syscohada

L’intégration de la nouvelle norme internationale révisée IFRS 16 portant sur les contrats de location peut être considérée comme l’un des changements les plus osés du nouveau référentiel comptable de l’OHADA. Oui, osé car l’impact de l’application de cette norme sur les agrégats clés des entreprises est l’une des inquiétudes majeures aussi bien des décideurs que des régulateurs au niveau international. Il s’agit, en effet, d’un revirement que nous allons découvrir dans cet article.

Le Syscohada révisé donne, en effet, la définition suivante des contrats de location :

« Un contrat est, ou contient, un contrat de location s’il confère le droit de contrôler l’utilisation d’un actif déterminé, pour une certaine période en échange d’une contrepartie. Le contrôle est conféré lorsque le client a le droit de décider de l’utilisation de l’actif déterminé et de tirer la quasi-totalité des avantages économiques de cette utilisation. »

Cette nouvelle définition implique qu’un contrat de location existe si et seulement si :

  • l’exécution du contrat dépend de l’utilisation d’un actif déterminé;
  • le contrat confère le droit de contrôler l’utilisation de l’actif déterminé pour une certaine période en échange d’une contrepartie.

Dans cet article, je vais essayer de décortiquer cette définition en m’inspirant des détails fournis par le norme IFRS 16 dont s’est inspiré le Syscohada révisé.

Il conviendrait dans un premier temps de rappeler le traitement qui se faisait jusqu’alors. Le Syscohada avait adopté la définition de l’ancienne norme internationale (IAS 17). Selon cette ancienne norme, il existe deux types de contrat de location: les contrats de location simple et les contrats de location-financement. Les contrats de location financement entraînaient une activation du droit d’utilisation de l’actif en contrepartie d’une dette financière. Aussi, le champ des locations était-il restreint au crédit-bail avec une exception pour les contrats d’une valeur inférieure à 5% du montant brut des immobilisations et pour les cas de levée d’option hypothétique. La comptabilisation des autres contrats de location (location simple) se faisait au compte de résultat avec information en annexe.

Avec la révision, la comparaison location simple -location financement s’avère désuète car, l’IFRS 16 considère que quelle que soit la nature du contrat , le droit d’utilisation de l’actif doit être évalué et activé. Autrement dit, aujourd’hui, les locations simples devraient aussi être activées. En lieu et place, il faut distinguer aujourd’hui les contrats de location des contrats de prestation de service, ces derniers étant traités comme des charges locatives. Nous allons donc nous concentrer sur les contrats de location.

Comme relevé plus haut, dès lors qu’il est établi qu’un contrat est ou contient un contrat de location, alors l’activation du droit d’utilisation de l’actif s’impose comptablement. L’analyse concrètement se fera via les deux critères essentiels suivants.

1. L’existence d’un actif identifié.

Il existe un actif identifié si l’actif est :

  • spécifié explicitement ou implicitement dans le contrat,
  • physiquement distinct,
  • Et que le fournisseur n’a pas de droit substantiel de substitution.

Il est considéré que le droit de substitution du bailleur est substantiel si le fournisseur  :

  • a la capacité pratique de remplacer l’actif ; et
  • retire des avantages économiques de l’exercice de ce droit de substitution de l’actif

Une partie d’un actif peut constituer un actif identifié si elle est physiquement distincte – par exemple, un étage d’un immeuble. Par ailleurs, une partie qui n’est pas physiquement distincte constitue également un actif identifié si elle représente la quasi-totalité de l’actif.  Par exemple, une partie de la capacité d’un câble de fibre optique est un actif identifié si elle représente la quasi-totalité de la capacité du câble ; et n’est pas un actif identifié si elle représente seulement une partie de la capacité du câble.

2. Contrôle de l’utilisation de l’actif

Pour déterminer si un contrat donne le droit de contrôler l’utilisation d’un actif identifié, l’entreprise évalue si le preneur dispose des droits suivants :

  • droit d’obtenir la quasi-totalité des avantages économiques liés à l’utilisation de l’actif identifié au cours de la période d’utilisation ; et
  • droit de diriger l’utilisation de l’actif identifié sur cette même période.

Les avantages économiques liés à l’utilisation d’un actif comprennent sa production principale, ses sous-produits et les autres avantages économiques liés à son utilisation pouvant être réalisés dans le cadre d’une transaction commerciale avec un tiers (par exemple, la sous-location de l’actif).

L’analyse du droit de diriger l’utilisation de l’actif peut comporter une part plus importante de jugement. Pour le preneur le droit de diriger l’utilisation d’un actif identifié signifie qu’il a le droit de diriger comment et dans quel but, l’actif est utilisé.

Si le client a les droits décisionnels suivants, qui permettent selon les circonstances de changer comment et dans quel but l’actif est utilisé, alors on pourrait conclure qu’il a le droit de diriger l’utilisation de l’actif :

a. le droit de modifier le type de production de l’actif (par exemple, décider d’utiliser un conteneur pour transporter ou pour stocker des marchandises) ;

b. le droit de changer quand les biens / les services sont produits / réalisés (par exemple, décider quand une centrale électrique est utilisée) ;

c.le droit de changer le lieu où la production / le service est réalisé(e) (par exemple, décider de la destination d’un camion ou d’un navire) ; et

d.le droit de modifier si les biens / les services sont produits / réalisés et ce, en quelle quantité (par exemple, décider de produire l’énergie depuis une centrale et décider de la quantité d’énergie produite

Si le client a le droit d’utilisation et que les autres critères sont remplis, il s’agit d’un contrat de location. Si par contre, le fournisseur a le droit de diriger l’utilisation, alors le contrat doit être traité totalement comme un contrat de prestations de services.

Dans certains contrats, les  décisions pertinentes sur « comment et dans quel but » l’actif est utilisé sont prédéterminées. Aussi convient-il de poursuivre l’analyse en examinant qui a le droit d’exploiter l’actif (ou de diriger un tiers pour l’exploiter selon son souhait) pendant la période d’utilisation sans que le bailleur puisse modifier ses instructions relatives à l’exploitation; ou, qui a conçu l’actif de manière à déterminer comment et dans quel but l’actif sera utilisé pendant la période d’utilisation. 

Un contrat peut inclure certaines clauses restrictives visant à protéger les intérêts du bailleur dans l’actif identifié, à protéger ses équipes ou assurer le respect par le bailleur des lois et règlements applicables. Ces droits protectifs définissent généralement la portée du droit du preneur à utiliser un actif mais ne l’empêchent pas, à eux seuls, d’avoir le droit de diriger l’utilisation de l’actif dans la limite définie. C’est le cas par exemple lorsque le contrat:

  • spécifie la limite maximum d’utilisation d’un actif, ou bien, où et quand le preneur peut utiliser l’actif;
  • exige qu’un preneur suive certaines pratiques opérationnelles particulières ; ou
  • exige qu’un preneur informe le fournisseur de changements relatifs à la manière dont un actif sera utilisé

Nous venons donc de décortiquer la nouvelle définition des contrats de location dans le référentiel comptable de l’ OHADA. Cet article nous a semblé indispensable car les détails ici présents ne sont pas inclus dans le référentiel. Nous ne pouvons terminer sans préciser que cette nouvelle définition ne s’applique pas aux:

  • contrats d’une durée inférieure ou égale à 12 mois et sans option d’achat;
  • contrats dont les actifs sont présumés de faibles valeurs (matériel informatique, matériel et mobilier, véhicules de tourisme par exemple;
  • contrats dont la levée d’option est hypothétique (prix de levée d’option assez élevé, par exemple 30% du prix d’achat, ou Décision du preneur de ne pas lever l’option en fin du contrat).

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Engagements en souffrance et dépréciations dans la Zone UMOA: Changements majeurs

Jusqu’au 31 décembre 2017, le dispositif applicable aux engagements des établissements de crédit s’articulait autour de l’Instruction n°94-05 relative à la comptabilisation et au provisionnement des engagements en souffrance et du dispositif prudentiel entré en vigueur le 1er janvier 2000.

Les changements intervenus à travers la nouvelle instruction n°026-11-2016 du 15 novembre 2016 relative à la comptabilisation et à l’évaluation des engagements en souffrance qui est en vigueur depuis le 1er janvier 2018 s’expliquent essentiellement par la nécessité d’aligner le traitement des créances en souffrance sur les pratiques admises au niveau international. Aussi, il faut dire que la définition que donne Bâle 2 des créances en souffrance oblige à revoir les règles existantes.

Selon les dispositions de Bâle 2 : « un défaut de la part d’un débiteur intervient lorsque l’un des deux événements ci-dessous se produit, sinon les deux :

  •  la banque estime improbable que le débiteur rembourse en totalité son crédit au groupe bancaire sans qu’elle ait besoin de prendre des mesures appropriées telles que la réalisation d’une garantie (si elle existe) ;
  • l’arriéré du débiteur sur un crédit important dû au groupe bancaire dépasse 90 jours. Les découverts sont considérés comme des créances échues dès que le client a dépassé une limite autorisée ou qu’il a été averti qu’il disposait d’une limite inférieure à l’encours actuel ».

De cette nouvelle définition, on peut tirer les observations suivantes :

  • Une créance est considérée comme douteuse lorsqu’elle est échue depuis plus de 3 mois. Précisons que le délai était de 6 mois jusqu’au 31/12/2017. La conséquence, toutes choses restant égales par ailleurs est que le niveau des dépréciations augmente avec les nouvelles dispositions.
  • Il faut toutefois noter que cette augmentation est mitigée par l’élargissement du champ des garanties éligibles au plan prudentiel, la prise en compte des paramètres de retour à meilleure fortune du client (reclassement en sain des créances douteuses sous certaines conditions) ainsi que l’obligation nouvelle consistant à reclasser en créances irrécouvrables les créances douteuses depuis 5 ans au moins.
  • Indépendamment des règles basées sur le nombre de jour d’impayés, tout indice de défaillance d’une contrepartie pourra conduire à une dépréciation.

Par ailleurs, en parcourant les nouvelles dispositions, on ne peut pas ne pas remarquer les changements suivants:

1. Créances impayés et immobilisées :

  • Le 1er changement remarquable est que les créances immobilisées ont été supprimées et traitées dans le cadre global des créances restructurées.
  • Les créances impayées quant à elles ne sont plus considérées comme des créances en souffrance. Elles sont classées en créances saines tant qu’elles ne remplissent pas les conditions pour être déclassées en douteux.

2. Créances en souffrance

La notion de risques pays a été supprimée. Désormais, les créances en souffrance sont constituées uniquement des créances restructurées et des créances douteuses et litigeuses.

3. Créances restructurées

Les créances restructurées font l’objet désormais d’une définition plus précise (Distinction faite entre Renégociation et Restructuration) et d’un traitement plus clair. En effet, une créance restructurée est caractérisée par l’existence d’une difficulté financière au niveau du client et d’une concession faite par la banque sur les termes du contrat, permettant au débiteur de payer sa dette. Aussi, une créance restructurée fait globalement 3 ans sous ce statut (maintenue d’abord en créances en souffrance pendant 1 an avant d’être reclassée en créance saine sous la qualification de restructurée pendant une période d’observation de 2 ans pendant lesquelles tout impayé de plus de 30 jours entraine un reclassement en douteux).

Il faut noter, en termes de nouveautés, l’obligation de comptabiliser en coût du risque une décote dès lors qu’il y a restructuration. Cette décote correspond à la perte qu’enregistre la banque du fait d’abandon d’une partie du capital/intérêts ou de la modification des flux contractuels liés à la restructuration elle-même. Concrètement, il faut faire la différence entre à la valeur actualisée des flux liés au tableau d’amortissement initial avant restructuration et la valeur actualisée des flux issus du nouveau tableau d’amortissement après restructuration. L’actualisation doit se faire au TIE (Taux d’intérêt Effectif) d’origine, notion importée des IFRS.

4. Créances douteuses et litigieuses

Les créances douteuses ou litigieuses sont régies par les dispositions de l’article 8 de l’Instruction n°026-11-2016 susvisée et sont constituées par :

  • les créances sur une contrepartie présentant des caractéristiques telles qu’indépendamment de l’existence de tout impayé, il est probable que l’établissement ne perçoive pas tout ou partie des sommes dues au titre des engagements souscrits par la contrepartie ;
  • les créances dont au moins une échéance est restée impayée depuis plus de quatre-vingt- dix (90) jours (seuil porté à 180 jours en ce qui concerne les PME/PMI et les entités du secteur public).
  • Pour les comptes ordinaires débiteurs (COD), l’ancienneté de l’impayé est décomptée dès que la contrepartie a dépassé une limite qui a été portée à sa connaissance par l’établissement assujetti ou que la contrepartie a tiré des montants sans autorisation de découvert. On peut remarquer que les règles de dépréciation des COD 3 mois sans mouvement créditeur ou 6 mois sans mouvement créditeur significatif ne sont plus d’actualité.
  • Désormais, les seuls COD considérés sont les découverts qui ont dépassé les limites autorisées ou qui sont tirées sans autorisation de découvert, et les COD 3 mois ne se retrouvant pas dans la catégorie précédente et qui sont sans mouvements créditeurs significatifs depuis plus de 3 mois. Ils sont à ce titre traités comme des créances douteuses.

5. Garanties éligibles

Désormais, les hypothèques de 2ème rang ne sont admises à titre de garantie réelle que si le 1er rang a été constitué au profit du même établissement de crédit. Ceci restreint le champ d’utilisation des Hypothèques.

Les garanties prévues par le dispositif prudentiel sont définies dans l’instruction relative à la définition des attributs sous le point 10. Je note l’élargissement à de nouvelles formes de garanties, notamment :

  • les titres de dettes respectant certains critères ;
  • les actions ou obligations convertibles en actions remplissant certaines conditions ;
  • les parts ou actions d’OPCVM et de FI respectant certaines conditions.

Par ailleurs, on note une certaine flexibilité, notamment au niveau des dépôts en espèce qui sont éligibles à condition bien sûr d’être nantis.

Aussi, en ce qui concerne les garanties à 1ère demande, la liste des garants éligibles a été élargie…

6. Dépréciation des créances douteuses et litigieuses

Les dépréciations de créances douteuses sont plus étalées dans le temps. En effet, la partie de la créance non couverte par des garanties éligibles doit faire l’objet d’une dépréciation de 20% à la date de déclassement, 50% au moins dans 3 mois et 100% dans 9 mois. Cette mesure permet, toutes choses étant égales par ailleurs, de réduire le coût du risque supporté sur un exercice en l’étalant dans le temps.

Pour la partie couverte par des garanties, la dépréciation est facultative pendant les deux 1ères années à compter de la date de déclassement. Elle doit couvrir 50% à partir de la 3ème année et 100% à partir de la 4ème année. Cette disposition est la même que dans l’instruction 94-05 à la différence que ce n’est plus forcément au terme des 3ème et 4ème années mais à tout moment dès lors qu’on passe respectivement les 2ème et 3ème années.

L’autre nouveauté est que les créances douteuses et litigieuses peuvent être reclassées en créances saines lorsque le crédit se dénoue normalement (montant + échéances respectées) sur une période d’un an. Le crédit est toutefois toujours qualifié de douteux pendant une période d’observation dite de « probation » de deux ans après le transfert en créances saines. C’est ce qu’on appelle le retour à meilleure fortune.

Une autre précision que j’ai noté est l’impossibilité de déprécier une créance sans au préalable la déclasser en douteux. On peut toutefois déclasser sans déprécier suivant des conditions spécifiques.

Les engagements hors bilan qui s’avèrent douteux doivent faire l’objet de provision pour leur totalité en tenant compte des garanties éligibles.

Exemptions :

Sont exemptés de la dépréciation :

  • les risques directs sur les Etats de l’UMOA, et organismes publics hors administration centrale des Etats de l’UMOA, ainsi que les risques garantis par ces mêmes agents économiques;
  • les créances restructurées.

7. Application des règles de contagion

La contagion s’applique comme avant mais avec deux exceptions (Article 11 de l’instruction n°26-11-2016) :

  • Les créances résultant d’un escompte commercial et,
  • les encours portés sur la clientèle de détail (Les critères d’éligibilité en clientèle de détail sont précisés dans le nouveau dispositif prudentiel).

A suivre…..