La forte urbanisation de l’Afrique ces dernières années ne va pas sans l’accroissement des infrastructures routières et des immeubles à usage commercial et professionnel. Dans ce contexte, il est de plus en plus fréquent de voir des firmes internationales ou locales ériger de grands édifices pour abriter leurs représentations ou leurs sièges sur le continent. Généralement, une partie des locaux de ces immeubles grandeurs nature est destinée à la location. Par ailleurs, se développe aussi la construction ou l’acquisition d’immeubles destinés carrément à la location ou à d’autres formes de valorisation. Dans les deux cas, on parlera de la détention par l’entité d’immeubles de placement.
Dans cet article, nous allons aborder l’essentiel à retenir de la notion d’immeubles de placement instaurée par la récente révision du Syscohada.
Définition et caractéristiques
Le SYSCOHADA révisé définit un immeuble de placement comme étant « un bien immobilier, c’est-à-dire un terrain, un bâtiment, ou une partie de bâtiment ou les deux (un terrain et un bâtiment) détenu par le propriétaire ou par le preneur, dans le cadre d’un contrat de crédit-bail ou location-vente pour en retirer des loyers ou pour valoriser le capital ou pour les deux.
Notons que cette définition est inspirée des normes comptables internationales, notamment l’IAS 40 qui donne, par ailleurs, certaines précisions quant à la qualification ou non d’un bien immobilier d’immeuble de placement.
Selon cette norme, on peut qualifier par exemple, d’immeubles de placement :
- un terrain détenu pour valoriser le capital à long terme plutôt que pour une vente à court terme dans le cadre de l’activité ordinaire ;
- un terrain détenu pour une utilisation future actuellement indéterminée (si une entité n’a pas déterminé qu’elle utilisera le terrain soit comme un bien immobilier occupé par son propriétaire, soit pour le vendre à court terme dans le cadre de son activité ordinaire, le terrain est considéré comme étant détenu pour valoriser le capital) ;
- un bâtiment appartenant à l’entité (ou détenu par l’entité dans le cadre d’un contrat de location-financement) et donné en location dans le cadre d’un ou plusieurs contrats de location simple ;
- un bâtiment vacant mais détenu en vue d’être loué dans le cadre d’un ou plusieurs contrats de location simple.
Sont, par exemple, des éléments qui ne sont pas des immeubles de placement :
- un bien immobilier détenu en vue de sa vente dans le cadre de l’activité ordinaire ou du processus de construction ou d’aménagement pour ladite vente, par exemple, un bien immobilier acquis exclusivement pour être vendu ultérieurement dans un avenir proche ou être aménagé et revendu ;
- un bien immobilier en cours de construction ou d’aménagement pour le compte de tiers ;
- un bien immobilier occupé par son propriétaire, y compris (entre autres choses) un bien immobilier détenu en vue de son utilisation future comme bien immobilier occupé par son propriétaire, un bien immobilier détenu en vue de son aménagement futur et de son utilisation ultérieure comme bien immobilier occupé par son propriétaire, un bien immobilier occupé par des membres du personnel (que ceux-ci paient ou non un loyer aux conditions de marché) et un bien immobilier occupé par son propriétaire en attendant d’être vendu ;
- un bien immobilier en cours de construction ou d’aménagement en vue d’une utilisation ultérieure en tant qu’immeuble de placement.
- un bien immobilier donné en location à une autre entité dans le cadre d’un contrat de location-financement.
Cas spécifiques
Dans un premier cas, nous allons considérer que l’immeuble entier est mis en location, le propriétaire étant ailleurs. L’ensemble de l’immeuble sera donc considéré comme un placement.
Dans un second cas, nous allons considérer que l’immeuble fait l’objet d’un usage mixte (Exploitation et placement). Dans ce cas particulier, il faudra avant tout s’assurer que les différentes parties de l’immeuble peuvent être vendues séparément. Une fois cette condition remplie, la partie qu’occupe l’entité sera traitée comme un immeuble d’exploitation pendant que le reste sera assimilé à un placement.
Toutefois, si la partie qu’occupe l’entité est non significative, le bien immobilier sera considéré dans son ensemble comme un immeuble de placement.
Par exemple, une entité vient d’acheter à crédit un immeuble de 4 étages pour 200 000 000 F CFA. Elle occupe le premier étage pour ses besoins administratifs et loue les autres étages à d’autres entités.
Il est indiqué que les différentes parties du bien peuvent être vendues séparément. On peut donc utiliser l’approche par composants. On comptabilisera ainsi un quart de 200 MFCFA soit 50 MFCFA en immobilisations corporelles, et trois quart de 200 MFCFA soit 150 MFCFA en tant qu’immeuble de placement.
Si par contre le propriétaire occupe juste une salle du 1er étage et que tout le reste y compris les autres salles du 1er étage est mis en location, on pourra considérer que la partie occupée par le propriétaire est non significative. Dans ce cas, l’ensemble des 4 étages de l’immeuble sera traité comme un immeuble de placement.
Une autre particularité des immeubles de placement est l’identification des biens immobiliers loués avec fourniture de services accessoires. De quoi s’agit-il concrètement ?
Un hôtel par exemple offre des services accessoires significatifs à la location de ses chambres, car dès lors qu’on loue une chambre, on dispose des meubles, du service de chambre, de l’assistance du personnel durant tout le séjour.
La location de chambre dans ce contexte ne pouvant être détachée des services accessoires, ces derniers pourront être considérés comme étant significatifs. Ainsi donc, l’immeuble d’un hôtel classique ne sera pas traité comme un placement mais un immobilier d’exploitation.
Par contre, le bien immobilier est à classer en immeubles de placement, si ces services sont non significatifs au regard du contrat pris dans son ensemble.
Évaluation des immeubles de placement
La norme IAS 40 de laquelle est inspirée cette nouvelle règle prévoit deux modes d’évaluation des immeubles de placement. Il s’agit de l’évaluation au coût et à la juste valeur. En IFRS, à l’initiation de l’opération, l’évaluation se fait obligatoirement au coût alors que lors des comptabilisations ultérieures, l’évaluation peut se faire selon l’une ou l’autre des modes d’évaluation précités.
La juste valeur n’étant pas retenue par le Syscohada dans ses modes d’évaluation, le seul mode qui reste est l’évaluation au coût aussi bien à l’initiation que lors des comptabilisations ultérieures. Autrement dit, l’évaluation d’un immeuble de placement dans l’espace OHADA ne présente aucune particularité par rapport aux immeubles d’exploitation, en termes d’évaluation.
Traitement comptable et présentation au bilan
- Dès lors qu’un immeuble de placement répond aux critères généraux de comptabilisation à l’actif, notamment si elles génèrent des avantages économiques futurs supplémentaires et que son coût peut être évalué de façon fiable, il doit être comptabilisé en immobilisation.
- Les dépenses ultérieures relatives à un immeuble de placement, doivent être comptabilisées en tant qu’actif du moment où elles sont encourues et répondent aux mêmes critères.
- A la clôture de l’exercice les immeubles de placement font l’objet d’un amortissement sur leur durée d’utilité.
Aujourd’hui, les Etats financiers annuels du Syscohada mettent en exergue sur, une ligne distincte, la quote-part des immeubles (inscrits à l’actif soit à titre de propriété, soit à titre de location financement/vente) détenus en placement.
Ainsi donc, l’impact essentiel de cette norme telle que retenue par le Syscohada révisé, est la présentation de la valeur des immeubles de placement de façon distincte à l’actif et l’exigence de notes spécifiques prévues pour leur analyse.
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