La vie comptable d’une société est un cycle en perpétuel recommencement et une corde sans fin au bout de laquelle il faut tisser de nouvelles.
La gouvernance n’est, en effet, pas réservé qu’aux matières de pure management. Elle est également applicable à la comptabilité. Ce que j’appelle la « Gouvernance comptable » est ce processus qui permet de passer d’une transaction comptable à des Etats financiers publiables.
Dans ce processus, il y a des dates clés à retenir. Ces dates sont d’une importance capitale non seulement pour le comptable, mais aussi pour toutes les autres parties prenantes de l’entité.
Cet article a pour objectif de mettre en exergue ces dates clés, leur importance et les conséquences liées à leur non-respect.
1. « Date de saisie » d’une écriture comptable versus « Date de l’opération ou transaction comptable » :
La date de saisie d’une écriture comptable est la date à laquelle le comptable de la société passe l’écriture dans le système comptable. Cette date est à distinguer de la date de l’opération comptable qui est la date réelle de l’opération qui fait l’objet de comptabilisation.
Exemple : La société BRUKOAK a acheté des ordinateurs pour un montant de 500 000 F CFA le 5 novembre 2019. Le comptable de la société saisit l’opération dans le logiciel comptable le 10 novembre 2019.
Dans cet exemple, la date de l’opération est le 05 novembre alors que la date de saisie est le 10 novembre, soit un décalage de 5 jours.
Quelle est l’utilité de cette distinction ?
En effet, selon l’article. 15 de l’Acte Uniforme relatif au Droit Comptable et à l’Information financière (AUDCIF), l’organisation comptable doit assurer :
- un enregistrement exhaustif, au jour le jour, et sans retard des informations de base ;
- le traitement en temps opportun des données enregistrées ;
- la mise à la disposition des utilisateurs des documents requis dans les délais légaux fixés pour leur délivrance.
Un bon système d’information comptable permet justement de retracer les dates et heures de saisies des opérations, ainsi que l’identité des personnes les ayant saisies. Cela permet de mettre en place les contrôles nécessaires pour éviter les déviations liées aux enregistrements tardifs et de situer les responsabilités au cas échéant. Il faut noter que l’étape zéro d’une comptabilité saine est la saisie adéquate et à bonne date des opérations comptables.
2. »Date de clôture » des comptes versus « Date d’arrêté » des comptes
L’AUDCIF dans son article 7 stipule que l’exercice comptable coincide avec l’année civile. Autrement dit, la date de clôture de l’exercice est fixée au 31 décembre de chaque année. Le principe de « spécialisation des exercices » conduit à rattacher à l’exercice toutes les charges et tous les produits le concernant et ceux-là seulement.
L’arrêté des états financiers est du ressort des organes dirigeants.
La date d’arrêté des états financiers par les organes dirigeants, légalement responsables, ne peut être que postérieure de plusieurs semaines, voire plusieurs mois, à la date de clôture, la limite fixée par l’ AUDCIF étant de quatre mois après la clôture, soit à fin avril.
Au cours de la période d’arrêté, l’entreprise rassemble toutes informations nécessaires à la régularisation des comptes (inventaire extra-comptable, évaluations, recensement des risques, etc.) ; prépare et établit les les états financiers annuels.
Dans les sociétés de personnes, le gérant a le pouvoir d’arrêté les comptes. Dans les sociétés de capitaux, le conseil d’administration (SA avec CA) ou le conseil de surveillance (SA avec CS) ou le président (SAS) ont la responsabilité d’arrêté les comptes. Ces derniers le font sur la base du rapport du Commissaire aux comptes prévus à l’article 715 de l’Acte Uniforme relatif aux sociétés commerciales et du GIE.

3. »Date d’approbation » versus « Date de publication » des comptes
La date d’approbation est celle de la décision d’adoption des états financiers par les associés (cas des sociétés). Elle doit intervenir dans les six mois à compter de la date de clôture de l’exercice i.e. au plus tard le 30 juin de chaque année. L’approbation des comptes est du ressort de l’assemblée générale des associés ou des actionnaires.
La date de publication des états financiers est postérieure à la précédente et recouvre des acceptions diverses, plus ou moins larges, qui supposent la définition des destinataires (actionnaires, épargne publique, administration fiscale, autres administrations, centrale des bilans, etc.). Elle est d’une importance capitale pour les entités côtés devant rendre disponible les données financières aux investisseurs actuels et potentiels ainsi que d’autres parties prenantes.
Il se pose toutefois une question. Quelle est la place du dépôt des Etats financiers auprès de l’administration fiscale?
Dans plusieurs pays, ce délai est fixé au 30 avril N+1 avec possibilité de prorogation d’un mois maximum. Ce qui veut dire que globalement, les comptes déposés en l’état sont publiés auprès de ce destinataire spécifique avant même d’être approuvés dans la plupart des cas, par l’assemblée générale des actionnaires/associés…. Est-ce à dire que l’administration fiscale prend consciemment le risque de recevoir des Etats financiers qui peut-être subiront des changements entre la date d’arrêté et celle d’approbation comme nous le verrons dans le paragraphe suivant ? En tout cas, la question est posée. A elle de répondre…
4. La prise en compte des événements postérieurs à la clôture de l’exercice
L’application du principe de prudence conduit à prendre en considération des événements survenus après la date de clôture et avant la date d’arrêté des comptes (article 49).
Par ailleurs, bien que les comptes aient été arrêtés, une obligation d’information des associés incombe aux dirigeants des sociétés (SA, SARL), sous certaines conditions, en ce qui concerne la période séparant la date d’arrêté des comptes de la date de l’Assemblée générale.
5. Comment s’organiser pour respecter ces dates clés.
Maintenant que nous avons fait le tour des dates clés, il est nécessaire de trouver des moyens pour les respecter autant que faire se peut.
Il est de coutume que les entreprises établissent ce qu’on appelle un « Calendrier d’arrêté des comptes ». Il s’agit d’un rétroplanning qui part de la date de publication prévue des comptes à la date d’impression de la balance avant inventaire.
6. Quelles conséquences du non -respect de ces délais?
Les dirigeants sociaux peuvent être poursuivis pour non-respect de ces délais au cas où les utilisateurs de l’information financière estiment avoir subit des dommages/préjudices du fait de ce retard.
le dépôt tardif des Etats financiers à l’administration fiscale entraîne des pénalités financières. C’est la même logique en ce qui concerne les marchés financiers. Mais encore plus pour ces derniers car un retard peut inquiéter les investisseurs qui vont peut-être commencer par céder leur actions créant ainsi un mouvement de panique qui fait chuter le cours de l’action de l’entité.
Au niveau de l’OHADA, le non-respect du délai légal de tenue des assemblées générales doit faire l’objet d’une demande de prorogation de délai par décision de justice (Article 548 de l’AUSCGIE).
Voilà, je vous souhaite une bonne fin d’année 2019, une clôture des comptes sans soucis, un arrêté des comptes paisible, un dépôt aux fiscs sans retard et une approbation des comptes sans besoin de prorogation. Pour ce qui est des événements postérieurs à la clôture, on s’en donne à Dieu!
Bonne année 2020 par anticipation!
Merci.
J’aimeJ’aime
Bien reçu merci
J’aimeJ’aime